Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Au voleur


France / 2009

30.09.2009
 



CHANGEMENT DE TRAJECTOIRE





Au voleur est l’avant dernier film de Guillaume Depardieu. Cette constatation, sans amoindrir la qualité d’un long-métrage touchant et patiemment construit, insuffle à l’histoire une imminence tragique indéniable. La réalisatrice Sarah Leonor ne construit pas un film social – même si celui-ci peut paraître douloureux socialement – mais une histoire d’amour, avec un grand A. Pour cela, il aura suffit d’une rencontre fortuite, d’un accident, de quelques gestes, d’un croisement de regards et d’un vol de voiture.

D’abord il y a Bruno, voleur fantôme au corps déchiré comme usé avant l’âge. Solitaire, il développe sans frasque sa routine de rapine pour survivre. Pourtant il ne se résigne pas et vit au jour le jour, vitupère contre son jeune voisin, Ali, qui tourne mal et accueille son vieil ami, Manu (Jacques Nolot, Sobre), tout juste sortit de prison. De cette errance ordonnée on dirait qu’il attend un évènement à même de lui offrir un nouveau chemin à arpenter. Incarné par un Guillaume Depardieu habité, Bruno est un écorché de la vie presque serein.
Ensuite il y a Isabelle, professeur d’allemand TZR (titulaire en zone de remplacement) n’ayant pas vraiment trouvé sa place. Elle fait des remplacements, répond au plus pressé. Portée par le jeu énergique de Florence Loiret Caille, Isabelle tourne en rond, cherche une échappatoire et brave l’interdit (elle n’hésite pas à fumer en classe devant une élève en cours de rattrapage).

Ce qui nous frappe à la vision de ce premier long-métrage n’est pas la rencontre amoureuse, plutôt classique dans son développement en trois temps (attirance, sexe, affection), mais le bouleversement narratif déclenché par les mésaventures de Bruno. Malgré leur rencontre, nos deux amants restent prisonniers d’un quotidien toujours aussi étouffant. La mécanique des journées où rien ne mène nulle part se répète ainsi inéluctablement en distillant son atmosphère particulière entre calme et imprévu. Cette première partie, filmée tout en retenue, impose des personnages fragiles portés par un même désir d’évasion. La réalisatrice installe habilement l’imminence d’un changement (scènes du quotidien, enquête policière de plus en plus pressante, relation amoureuse sérieuse) mais peine à le personnaliser. Pourtant, en proposant ce point de rupture narratif, Sarah Leonor recompose une relation et dynamise un film, certes maîtrisé, mais qui était en passe de perdre son rythme initial.

Si la transition est abrupte et quelque peu bâclée dans sa tournure évènementielle, elle s’avère surprenante en termes de prise de risque scénique. Leur fuite dans une forêt entourée de marécages devient l’endroit idéal pour capter des sensations, des visages, des postures, des libertés. Ce retour à la nature ressemble alors à un Eden transitoire ou l’amour, libéré des contraintes sociales trop fortes, est possible. Sorte de road-movie bucolique proche d’un Malick dans son traitement contemplatif, l’évadée sauvage se terminera mal. Mais en choisissant de suivre Bruno pendant les quelques jours que dureront leur escapade, Isabelle se sent revivre, autant pour elle que pour lui. Elle deviendra le moteur d’un « couple » ayant accepté de franchir le passage d’une réalité morne à celui d’un rêve d’évasion salutaire. Quoi qu’il en coûte pour Bruno.
 
geoffroy

 
 
 
 

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