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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Le Dernier Vol
France / 2009
16.12.2009
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UNE ERRANCE QUI S'ENSABLE
« Tu entends le chant des dunes... »
Karim Dridi est un cinéaste atypique. Pour son dernier film, il n’hésite pas à changer de dimension : histoire, budget, mise en scène, acteurs. A tel point qu’il est difficile d'y déceler une quelconque filiation avec son travail passé et son attirance pour les lieux tampon d’une République générant de l’exclusion. Film d’aventure historique teinté de romanesque, Le Dernier Vol se déroule en plein désert du Ténéré dans les années 30 et nous offre comme têtes d’affiche le couple le plus glamour du moment : l’oscarisée Marion Cotillard et l’acteur/réalisateur césarisé Guillaume Canet.
Malgré une introduction plutôt bien rythmée, nous déchantons vite. Sans chercher bien loin l’origine de notre déception, il est aisé de constater que le film n’est pas à la hauteur des attentes, ni même du sujet abordé. En effet, il semble que l’association budget conséquent/couple de stars, ait refroidi pour ne pas dire éteint la caméra pourtant si aérienne de Dridi. Sans être un mauvais film, Le Dernier Vol ne prend aucun risque narratif, propose une histoire factuelle qui ronronne jusqu’à l’épilogue, certes touchant, mais trop démonstratif dans sa déclaration. L’ennui pointe le bout de son nez et, plus grave encore, nous détourne des enjeux d’une histoire ambitieuse.
Comme tout grand cinéaste, Karim Dridi sait planter un décor. Le poste avancé dans lequel des méharistes français essayent tant bien que mal d’imposer aux rebelles touaregs la vision impérialiste de la France, constitue le paysage d’une rencontre originale et intrigante. A ce réalisme de terrain (celui de la colonisation) se voit confronter la volonté passionnelle d’une femme partit à la recherche de son amant, aviateur anglais crashé en plein désert quelques jours auparavant. Dridi imbrique ces deux dimensions pour formuler un discours politique comme philosophique dans lequel l’héroïsme et la notion d’espoir répondent constamment à l’attente et aux désillusions.
Une quête universelle
Dans ce paysage de dunes, Marie Vallière de Beaumont (Marion Cotillard toujours aussi envoûtante) dynamite les conventions au point de créer une tension hiérarchique au sein du poste. Son rapprochement avec Antoine, soldat en rupture vis-à-vis de sa hiérarchie (Guillaume Canet hélas trop effacé), nous interroge sur le sens des véritables priorités. La quête de Marie est universelle. Elle est aussi intime. Rien ni personne ne pourra l’arrêter. Ni le capitaine Vincent Brosseau, ni le conflit entre l’armée française et les rebelles touaregs, ni le pessimisme d’Antoine malgré son soutien. Le point fort du film repose définitivement sur les épaules d’une jeune femme amoureuse, mais elle aussi perdue en plein désert.
Structuré en deux temps (rencontre puis séparation), le film perd de son intérêt au fur et à mesure du développement. En effet, si la quête intérieure de Beaumont n’est pas moins intéressante que celle formulée par Antoine sur les raisons de la présence française en Afrique, elle est juste noyée dans une langueur contemplative incompatible avec la détresse revendiquée. Karim Dridi construit une allégorie académique et plutôt répétitive sur le besoin de vérité. Confuse, elle force l’action, motive les convictions mais ne permet pas d’y trouver la paix recherchée. En somme, Le Dernier Vol est incapable de délivrer des émotions enfouies dans le sable d’un Sahara froidement silencieux.
geoffroy
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