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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Mr. Nobody
Belgique / 2009
13.01.2010
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LES MONDES DE NEMO
«- La plupart du temps, il ne se passait rien, comme dans un film français. »
Etrange film que le nouveau Jaco van Dormael. Une expérience. Pas totalement aboutie. Mais loin d’être ratée. Voyageant dans le temps, le film, dans le genre fantastique, est labyrinthique, optant pour plusieurs destins à travers un seul personnage, ce fameux monsieur Nobody. Personne. Ou Tout le monde. Bref nous voici avec un héros qui n’est autre que l’incarnation d’un être humain quelconque, dont les vies vont illustrer un propos philosophique. Voire métaphysique. C’est casse-gueule. Rien n’est linéaire. Tout est morcelé. Un puzzle où les pièces se mélangent dans un bordel sans nom. Mister Nobody est le dernier mortel, dont la vie passée semble confuse. Troubles de la mémoire qui lui permettent de s’inventer des histoires, son histoire. Cela commence avec la séparation de ses parents. Déchirure et fin de l’innocence. Deux itinéraires possible. Puis trois femmes potentielles. Autant de conséquences infinies. On s’y perd parfois. Toujours compliqué d’expliquer l’effet papillon.
Van Dormael a du faire des choix. De scénario comme de mise en scène. Le réalisateur n’a pas perdu de son talent, malgré l’imposante production. La direction artistique haut de gamme, les très bons comédiens, les beaux mouvements de caméra en font un film élégant et suffisamment séduisant pour ne pas être largué quand l’histoire nous lâche. Mais le découpage pose parfois prolème. A peine s’est-on habitué à un ton, une ambiance, une des vies de Nobody, que nous voici propulser dans une autre de ses vies, radicalement différente. Ces ruptures créent un rythme, un peu factice, et dillue l’émotion, voire l’attachement que l’on pourrait ressentir pour un des personnages. Trop préoccupé par ses théories, l’auteur refuse que l’on s’identifie à une des existences de cet antihéros. Ce qui créé l’effet pervers de ne pas nous passionner davantage pour ces destins éventuels.
Car ça se joue à pas grand chose un destin. Des accidents de la vie, des hasards, des gestes, des mots, des choix. Van Dormael, après treize ans d’abstinence cinématographique, avait sans doute l’imagination fertile et une abondance de choses à dire. Les références pleuvent – L’armée des douze singes, Harold et Maude, les clips de Gondry, ses propres films ... On imagine mal qu’il n’ait pas écrit tout cela sciemment puisque le film traite de la lucidité, de cette volonté d’avoir conscience de tout. Hélas, le film devient inégal, selon les séquences, qui se juxtaposent, se mélangent, parfois « barrées », de temps en temps dramatiques. Ce grand désordre, sorte de big bang chaotique, conduit au message qu’il veut faire passer. « Chaque chemin a été le bon chemin ». Et Van Dormael, refusant de choisir, laisse le spectateur le faire à sa place, en fonction de ses affinités. C’est la limite du cinéma pour ce genre de proposition : on nous emmène d’un point A à un point B, enfermés dans une salle, dans le noir. Ce déterminisme était très bien maîtrisé dans Toto le héros, où le gamin se faisait volait sa vie et fantasmait d’avoir celle qu’on lui avait prise; déterminisme très réaliste dans Le huitième jour où Daniel Auteuil choisissait une autre voie que celle où il avait échoué. dans les deux cas il y avait ce rapport et ce retour à l'enfance.
Mais là, plus ambitieux, plus approfondit, Mr. Nobody devenait une histoire interactive,où l’auteur invente une forme de jeu d’arcade. De là naît une frustration, un sentiment de liaison inaccomplie entre l’œuvre et celui qui la regarde.
vincy
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