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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Le livre d'Eli (The Book of Eli)
USA / 2010
20.01.2010
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FAITH TO FACE
«- Il n’est pas comme les autres. Tu ne pourras pas lui faire faire ce que tu veux.»
Disparus de la circulation depuis From Hell (relecture hasardeuse mais plutôt bien foutue des méfaits de Jack l’Eventreur sortit en 2001), les frères Hughes refont surface en ce début de décennie avec Le Livre d’Eli, variation très graphique du genre post-apocalyptique. Coincé entre le néo-western et la parabole biblique, leur dernier film se découvre avant tout comme un post nuke à l’esthétique léchée. Scènes de combat ultra chorégraphiées, paysages à la surexposition tranchée, effet de mise en scène assumé…bref, les 80 millions de dollars sont bien là, sur une pellicule a priori enivrante.
Brassant à grandes enjambées des concepts tournant autour de la terre promise, de la mission divine à l’incarnation révélée, du bien contre le mal, du sacrifice ou du rachat possible d’une humanité destructrice et barbare, le Livre d’Eli esquisse les contours d’une épopée héroïque d’un homme cheminant pour le salut de ses frères. Si l’introduction donne le ton et favorise l’immersion dans un monde dévasté, l’évolution narrative autour d’Eli (Denzel Washington, crédible) se délite inéluctablement pour atteindre un vide philosophique assez remarquable. L’objectif des frères Hugues n’était sûrement pas de proposer une fable philosophique lorgnant du côté de La Route. En effet, son traitement pour le moins manichéen, enjeux et dénouement compris, affaiblit la portée symbolique d’une mission en tout point trépidante. Pour se consoler, reconnaissons une ligne conductrice fidèle même si l’intensité fait cruellement défaut.
Le cheminement d’Eli dans une Amérique désertique dominée par la violence de motards analphabètes bascule lorsque celui-ci traverse une petite ville dirigée par Carnegie (incarné par un Gary Oldman cabotinant à qui mieux mieux), autocrate cultivé à la recherche d’un livre, unique exemplaire que possède Eli. Et là, patatras ! L’histoire, malgré une longue séquence dans la demeure de Carnegie particulièrement bien découpée, s’enfonce dans la caricature plate, les personnages devenant des stéréotypes au service de leur fonction première. L’affrontement du bien et du mal commence, Eli se servant du livre comme un message de paix, Carnegie le voulant pour asservir plus facilement ses ouailles. L’idée, loin d’être idiote se retrouve grossière, le traitement du qui perd gagne s’avérant vraiment peu concluant. S’ensuit une bataille d’égos sur fond de trahison dans un monde qui ne semble plus attendre un quelconque prophète.
Si nous passons sous silence la morale simpliste proche du message réac, le spectacle demeure distrayant et nous propose un mixte action-illumination qui fait du Livre d’Eli un exercice de style capable de séduire un public au-delà des fans du genre.
geoffroy
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