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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Les invités de mon père
France / 2010
31.03.2010
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LA FIANCEE QUI VENAIT DU FROID
«- Je t’ai dit qu’on pouvait se lâcher, mais c’était pour de nouvelles rations de blinis, pas pour un inceste avec des échangistes ! »
Anne Le Ny n’a peut être pas encore gagné ses galons de réalisatrice, à l’instar d’une Nicole Garcia, mais en deux films, elle a su installer une sensibilité qui lui permet de ne jamais verser dans la facilité, comme Isabelle Mergault. Proche du cinéma des Jaoui-Bacri, Les invités de mon père compense une mise en scène sans éclat par une caméra entièrement centrée sur l’excellent jeu des comédiens et portée par un scénario subtil et maîtrisé.
Car c’est loin d’être « n’importe quoi » comme leur histoire.. Au delà du drame familal, les rires fusent. Les sarcasmes se succèdent à l’ironie sous le regard cruel de Le Ny. Les bobos bienfaisants, les résistants au système, la compassion dictée par une pensée hypocrite sont détournés, retournés, pour mieux tordre le cou aux clichés. Les gauchistes du Paris chic, entre Parc Montceau et Panthéon, en prennent plein leurs gueules. Forcément, ça laissera des traces : un bureau abîmé, une rupture consommée, une conscience culpabilisante…
Car dans ce noyau familial, « petit bourgeois » ou « nouveau riche », selon l’auto-critique, une Bombe Moldave avec « l'idéologie de Milosevic », ça implose les certitudes et les mensonges. Le quotidien s’en retrouve bousculé, les relations humaines se transforment et les grandes causes auxquelles on croit s’effondrent devant nos préjugés et nos peurs. Les arrières pensées mesquines anéantissent les bons sentiments. Les principes de solidarité se confrontent aux égoïsmes intéressés. La générosité a ses limites. Cette jouissance à voir ce film met mal à l’aise, comme dans La vie est un long fleuve tranquille, mais la gêne s’évacue, grâce aux dialogues et à certaines situations, par le rire. Dernier rempart avant la réflexion, ou la folie.
Les comédiens insufflent une belle énergie à leurs personnages un peu fracassés par ces changements. La relation frère/sœur (Viard et Luchini) est à la fois rare, touchante, et précieuse. Leur éducation, l’environnement, la culture française ont beau les rendre suspicieux, méfiants, spéculant sans preuve sur une tragédie éventuelle, ils restent humains et attachants. De même, malgré sa dureté liée forcément à un vécu violent, Tatiana, apparaît parfois, avec ses armes, faillible et victime.
C’est dans cette vérité qu’il ne faut jamais se fier aux apparences que le film trouve son équilibre et ses nuances. Et nous rév èle telles que nous sommes : conditionnés. En cela, le film est loin d’être formaté et dévoile une singularité qui émeut.
vincy
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