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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Tengri, le bleu du ciel (Tengri)
France / 2009
28.04.2010
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LES AMANTS IRREGULIERS
"Connaître d’autres pays, d’autres gens… ça doit être extraordinaire !"
Après le Tibet (Lung Ta, les cavaliers du vent) et la Mongolie (Molom, conte de Mongolie), la Française Marie Jaoul de Poncheville est visiblement tombée sous le charme du Kirghizistan. Elle y plante donc le décor de son nouveau film, Tengri, le bleu du ciel, une histoire d’amour universelle, prétexte à filmer les incroyables paysages du pays et à parler de ses coutumes, mais aussi de ses conditions de vie. Celle des femmes, notamment, à peine mieux considérées que du bétail, et sur lesquelles les maris ont droit de vie et de mort. On découvre également la tradition orale à travers l’épopée Manas (équivalent de l’Odyssée d’Homère) qui se transmet depuis plusieurs siècles et l’incursion de la modernité par le biais du rap ou de l’internet qui ressemble tant au "Tengri" la divinité des nomades d’Asie centrale comparable à l’infini.
Dans un premier temps, on sent la réalisatrice plus désireuse de nous faire partager cette culture et ces traditions que de faire avancer son intrigue. D’où une construction ténue qui, de micro-scène en micro-scène, donne un riche aperçu de la vie dans les montagnes, mais fait traîner le récit. Peu à peu, la tendance s’inverse, et les personnages d’Amira et de Temür prennent vraiment de l’ampleur. L’histoire d’amour impossible devient enfin le moteur du film, qui conduit les personnages à braver les interdits et repousser leurs limites. A ce stade, l’aspect documentaire passe au second plan (on relève même quelques invraisemblances car les fugitifs sont particulièrement imprudents) et la dimension symbolique et onirique de ce conte atemporel prend le relais. Or, on sait gré à Marie Jaoul de Poncheville de faire basculer ainsi son histoire et de laisser place au rêve et à l’espoir, quitte à faire preuve d'une certaine naïveté.
Seul bémol finalement face à ce joli Tengri, le bleu du ciel : l’admiration excessive de la réalisatrice pour son sujet, qui fait perdre de sa force au film. En filmant le Kirghizistan avec un regard de touriste émerveillée, elle le transforme en effet en décor exotique. Même chose pour les morceaux de musique traditionnelle, absolument magnifiques, mais qui mis bout à bout pendant une heure et demie finissent par donner l’impression d’une compilation systématique, comme s’il fallait à tout prix parler du Kirghizistan à travers ces images et ces sons de carte postale. C’est probablement là toute la différence entre un regard français, forcément esthétique, voire didactique, et un regard kirghize, plus direct. Pour le reste, les mythes (celui de l’amour fou), les combats (le droit des femmes, la liberté, l'entraide) et les sentiments sont exactement les mêmes.
MpM
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