Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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L'Illusionniste


France / 2010

16.06.2010
 



LES AVENTURES DE TATI EN ECOSSE





L’illusionniste porte bien son titre. Un cinéma qui nous fait croire à la résurrection de Jacques Tati, qui nous renvoie à un monde oublié. Plus qu’un film hommage, il s’agit d’une œuvre nostalgique. Dès les premiers plans, Sylvain Chomet nous transporte dans un Paris antérieur. Celui du Royal Luxor, de Mogador, du Lido, de Bobino, de l’Olympia, cu Caveau de la Huchette. Les temples du music-hall. A l’instar des Triplettes de Belleville, le réalisateur nous immerge dans une France "noir et blanc", dans cette époque glorieuse fabriquante de mythes. Une France qui se mite. Magie désuette.

Et on voit bien ce qui contrarie Chomet, l’illustrateur, le résistant à la 3D. Il regrette le temps où l’on fumait dans les lieux publics, les deux CV, les lapins qu’on sortait du chapeau pour émerveiller les gens. A voir comment il dépeint le progrès, on sent une pointe d’amertume. L’électricité qui amène le juke box dans un village, le rock avec ses boys band follasses et leur cortège de fanatiques, la télévision qui hypnotise, le consumérisme, la publicité décervelante…
Alors il s’attache à son personnage maladroit de Tatisheff. L’icône d’un cinéma atemporel, comique et mélancolique. Poétique. Le symbole de sa vision idéale (utopique) d’une société insouciante et ludique. On comprend que le cinéaste se soit retrouvé dans cet artiste bohème un peu « loser » et très romantique. Il y insuffle son style, des décors à la Tintin ("L’étoile noire" semble omniprésente dans ces paysages écossais), des histoires sans paroles (ou presque : les dialogues ne sont pas traduits ajoutant aux malentendus et incompréhensions qui contraignent chacun à être expressif et gestuel).

Cela ne manque pas de charme. L’illusionniste séduit, divertit. Les gags à la Tati y contribuent évidemment. La profondeur des sentiments et la simplicité de l’histoire s’accrochent à nous comme un délicieux parfum de dame en noire qui nous rappelle notre enfance ou la jeunesse de nos parents.
Le dessin, le regard de Chomet manque de vitalité et de chair pour nous toucher complètement. Même si l’émotion est évidente, cette tristesse permanente qui imprègne le film empêche de nous bouleverser comme nous l’aspirions. Les clowns ne sont pas joyeux dans cet univers de solitaires désespérés.

Mais la fable, dénuée de cynisme comme de dilemme, amuse aussi. Le portrait d’un show-biz artisannal, avec ses petites arnaques entre amis, les sales tronches des managers, …. Cela ne maquille pas le désenchantement ambiant. Pourtant, avec le personnage d’Alice, le pays s’émerveille. Robe bleue et blanche, candide apprivoisant un lapin blanc un peu rétif, découvrant un univers souterrain loin de sa misère provinciale où elle jouait les Cendrillon, elle apporte une touche de conte de fée dans ce monde en faillite. Les marionnettes sont soldées, les magiciens bradent leurs accessoires, le sensationnalisme l’emporte sur le mystère.
Sylvain Chomet affirme que les magiciens n’existent pas (plus ?) et démontre son propos avec cette jeune fille qui perd à son tour sa joie de vivre en devenat citadine, élégante, et comme les autres filles qu’elle croise.

Ce bonheur impossible rend l’ensemble déprimant, loin des pilules euphoriques filmiques de Monsieur Hulot. Mais pas de quoi fuir à toutes jambes, comme ce Tatisheff animé qui rentre (et ressort aussi vite) dans le bien nommé Cinéma Caméo, semblant déboussoller de voir Jacques Tati dans Mon Oncle sur grand écran. Un tour de « passe passe » bienvenu, mais qui révéle, cruellement, l’abyme entre les deux époques : Tati était moderne, Chomet est passéiste.
 
vincy

 
 
 
 

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