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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Buried
USA / 2010
03.11.2010
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SOUS LE SABLE EXACTEMENT
Six pieds sous terre. 90 minutes à passer avec un acteur, dans une boîte. L'enfermement à son paroxysme. La phobie d'être enterré vivant(e) s'avère bien plus terrifiante qu'un simple zombie se tranchant la tête avec un canif. Cette peur primale déjà filmée par les séries TV ou vue dans Kill Bill, ce qui n'a pas empêché le script d'être culte avant même la sortie du film. 90 minutes sans faire un plan à l'extérieur ou faire intervenir, et juste deux accessoires : un défi et un exploit.
Trois réactions sont possibles: le rire pour les adeptes de l'humour noir (le scénario va loin, très loin pour faire souffrir Paul. Par moments on sourit quand Paul arrive à joindre une amie ou le 911 avec son téléphone), l'ennui et l'endormissement (il faut dire que l'écran reste noir ou assez sombre). Ou alors, l'empathie avec le héros. Après tout, le spectateur n'est-il pas lui-même dans un endroit sombre, souvent en sous-sol, dans un état d'impuissance totale ? Parabole de notre condition humaine prête à se cloisonner dans une salle de cinéma.
Quelque soit l'option que vous choisissiez, ce voyage (immobile) au centre de la Terre vous rendra claustrophobe. Brillant exercice de style (qui n'atteint pas les modèles hitchcockien dont il s'est inspiré), l'angoisse est particulièrement bien rendue. Le tout début est particulièrement marquant : un écran noir pendant plusieurs minutes, le silence, puis on entend quelqu'un haleter, se réveiller et hurler de façon hystérique. Réveil douloureux du cauchemar irakien. Parabole de la débâcle américaine au Moyen-Orient.
Le bonheur, est-ce simple comme un coup de fil ... et ça sauve souvent nos héros que ce soit dans Phone booth ou la série "24 heures chrono". Cortés en fait l'un des rares outils qui cohabitent avec l'homme piégé. Avec une forte dose de stress, ce film d'action où le héros est allongé et ne voit rien à part son téléphone, c'est un comble, et une leçon à tous les producteurs qui fantasment sur la pyrotechnie et les débauches de cascades. Le téléphone devient son seul partenaire de jeu. Mais, parallèlement, le personnage se rend compte que son existence vaut peu aux yeux de son employeur, du FBI, de ses amis... Cette dévalorisation en fait le pantin idéal pour son ravisseur qui s'en amuse de manière perverse. Parabole d'un jeu de télé réalité qui désincarne nos existences, les matérialisant plutôt que les humanisant.
Ryan Reynolds, plutôt habitué aux comédies romantiques ou pataudes, est parfait, et nous joue toute la gamme des émotions humaines - désespoir, espoir, cynisme , folie, colère, douleur, amour. On regrettera cependant le testament à son fils, un peu trop "pathos" et légèrement plombant. C'est d'autant plus regrettable que la satire est proche, soulignant les absurdités bureaucratiques, la cruauté du monde du travail, et finalement une guerre qui renie ses troupes.
Reynolds pendant ce temps sue, souffle, essaie de respirer, étouffe. Cette tension, cette transpiration, ce n'est jamais qu'une Amérique au bord d'imploser, comme une cocotte minute.
Alors oui c'est improbable, oui la caméra n'est pas aussi radicale que certains l'auraient voulu : les angles sont travaillés pour un découpage qui dynamise. Idéalement, un seul plan aurait du être possible, à l'intérieur du cercueil.
Mais déjà, c'était assez éprouvant ainsi. On est heureux quand on respire de l'air, même pollué, à la sortie de la salle. Claire
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