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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Never Let Me Go
Royaume Uni / 2010
02.03.2011
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"Les écoles qui restent sont des élevages en batterie."
Romanek sait installer une ambiance, capter les subtilités des regards, et raconter son histoire glaçante avec des images d'une douceur presque apaisante. Comme une anesthésie qui nous nous permet de ne pas souffrir parce que nous nous endormons.
Never Le Me Go nous perd au 2e chapitre. Malgré ses belles qualités artistiques, le film subit un scénario troué de toute part. De nombreuses questions n'ont aucune réponse. Il aurait fallu l'épurer davantage, ou au contraire fournir des détails. Comme il nous manque des clefs, les personnages flottent dans un récit fataliste, sans jamais quitter le tracé dessiné dès le début. Étrangement dociles, ces donneurs d'organes ne se rebellent jamais, ne cherchent jamais à s'échapper de leur condition bestiale, ne font jamais appel à leur libre arbitre. Il y a peut-être une explication scientifique (puisque c'est le point de départ), politique ou psychologique, mais nous n'en saurons jamais rien. Si bien que notre trio de jeunes gens, aussi attachants soient-ils nous laissent à nos interrogations et, n'y répondant pas, nous détache de leurs tourments.
Mais, comme écrit plus haut, le réalisateur est parvenu à nous captiver durant la moitié de son film. La première partie, avec les enfants, qui est mise en valeur avec les participations des excellentes Charlotte Rampling et Sally Hawkins, est de loin la plus passionnante. Avant que le film ne vire dans la science-fiction existentialiste, Never Let Me Go propose un élevage de gamins formatés, dont trois amis qui vont composer un triangle amoureux. Le script est riche de ses multiples niveaux de lecture, ses quelques révélations, et de son enjeu : y-a-t-il une issue à leur destin de créatures sacrificielles ?
Mais rapidement, une fois leur rôle connu, les enfants ayant grandit, se complaisent dans des sentiments amoureux assez superficiels, avec ses coups de coeur et ses pannes de coeur. Aucune tension ne nous maintient en vie. Léthargiques, nous nous enfonçons avec résignation dans ce film morbide. Tout, à y réfléchir, est effrayant : l'acte monstrueux de sacrifier des jeunes gens pour prolonger la vie des autres comme leur soumission à aller à l'abattoir. Avec le rythme d'une vache qui marche sur son pré sans jamais se demander si l'herbe est plus verte chez le voisin, le film fonce vers son impasse. Mais au lieu de nous percuter, au lieu de nous interpeler en donnant du sens à ces actes, le drame s'enfonce dans des ellipses ou des facilités explicatives, sans jamais insuffler des doutes ou dévier les certitudes. Par conséquent, le film apparaît aussi vide que vaniteux, malgré la belle présence de Carey Mulligan et la jolie sensibilité d'Andrew Garfield. Il manque à Romanek (grand réalisateur de clip et davantage impressionnant avec son premier film, Photo Obsession) ce talent de mettre en images les mots et de donner des mots à ses images. vincy
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