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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Tomboy
France / 2011
20.04.2011
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LA PEAU QU’ELLE HABITE
« - T’es bien en fille »
Il y a d’abord la crainte. Celle de séquences un peu longues qui retardent le déclenchement du piège. Tomboy est court et l’on appréhende très vite la lenteur du film qui s’attarde, au début, sur des plans parfois insignifiants. Mais il y aussi la curiosité. Car la construction du scénario est habilement mis en image. Le trouble qui habite l’aîné(e) d’une famille bourgeoise d’une banlieue normale nous envahit dès les premières images : fille ou garçon ? Le doute persiste un bon quart d’heure. Jamais son sexe n’est mentionné, ni son prénom. Puis on l’entend se présenter. Michaël. Quelques minutes plus tard, il y a la scène de bain. C’est une fille.
Alors, nous sommes intrigués. Double identité. Le sujet n’est pas si rare au cinéma. Du léger et touchant La vie en rose (un garçon qui se prend pour une fille) au mystérieux et dramatique XXY (un hermaphrodite), le trouble de l’identité sexuelle intéresse, interroge. En prenant le cas d’enfants, on évacue le problème de la sexualité pour l’approcher sous l’angle psychologique et humain.
Tomboy est un film sur le malentendu et l’incompréhension. Laure/Michaël va se retrouver isolé(e) dans son mensonge, dans sa peau. Heureuse en garçon, mal dans sa peau en fille. Comment exprimer ce mal être ? Céline Sciamma le fait avec sensibilité, sans outrances, sans exhibitionnisme. Il y a les jeux de l’enfance, l’enjeu de la différence. Doucement, elle accélère le rythme, le scénario multiplie les scènes, les personnages, et les bonnes idées. Il prend aussi un ton plus léger, sur le fil de la comédie. La petite sœur, extraordinaire de naturel et de fraicheur, devient la complice de son mensonge, devenant elle-même légèrement schizophrène. Par ses subterfuges, l’adorable gamine tire le film vers des moments plus aériens. La meilleure copine éprise d’un garçon qui n’en est pas un et qui s’offre ainsi son premier baiser lesbien. Et Laure qui essaie de pisser debout, qui se modélise un sexe masculin pour la séance de baignade… Le film ne cache rien de l’ennui des enfants et de leurs besoins de rêver. De leur cruauté aussi, même si elle est ici relativement douce.
Œuvre acidulée, entre béton des HLM et forêt onirique, on pressent les suites du drame dès que la vérité sera révélée. La tension permet de tout supposer. Bien écrit, Tomboy parvient à équilibrer le vide qui remplit la vie de ces enfants par un regard dénué de jugements et des actes aussi simples que paradoxaux. Lorsque la vérité éclate, chacun va pouvoir exprimer ce qu’il est vraiment. La mère prend enfin toute son importance, reléguant le mari à un objet de fascination et de divertissement.
De ces contrariétés, et de ce sexe contrarié, Céline Sciamma ne tombe jamais dans le piège de l’obscène ou du pathos, de la tragédie ou de la morale. Elle responsabilise chacun de ses personnages. Presque utopique, la fin laisse en suspens ce que deviendra Laure à l’adolescence. Sa confusion des sentiments, sublimée par des petits riens, nous a conquis, ne nous laissant jamais indifférent. Malgré l’aspect formel plutôt simple du film, la cinéaste a réussit une fiction complexe, explorant les nuances sans jamais les appuyer lourdement.
Cette deuxième œuvre sur la naissance prouve que la réalisatrice a un ton singulier, lumineux et gracieux pour évoquer les tourments les plus obscurs. On ne peut être que charmé.
vincy
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