Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Le chat du Rabbin


France / 2011

01.06.2011
 



FELIN POUR L’AUTRE





« - Je ne suis pas circoncis.
- Les chats on ne les circoncit pas.
»

Le Chat du Rabbin a été l’une des bandes dessinées les plus audacieuses de ces dernières années, révélant le talent de Joann Sfar, mélangeant religion, humanisme et contradictions d’un monde en pleine mutation. Adapter les cinq tomes relevait certainement d’une gageure tant l’histoire se perdait dans les méandres de ces confrontations et s’amusait des indécisions de ses personnages. Le dessin animé se concentre essentiellement sur un peu moins de la moitié du récit, s’évitant toute la partie française, la relation de la fille du rabbin avec un jeune homme de bonne famille venu à Alger… Ce choix scénaristique vide un peu l’épopée promise, qui se concentre finalement sur le voyage initiatique d’un vieil homme qui essaie de comprendre ce monde qui ne tourne pas rond.

Road movie utopique, le film ne tient pourtant pas la route. La 3D est totalement inutile tant le dessin, très fidèle à la BD certes, est plat. On est à la limite du 2D, les décors sont figés, les plans souvent fixes et seul le mouvement de la caméra nous fait oublier qu’il ne s’agit pas de pages sur grand écran. La voix off nous fait vite comprendre les obstacles d’une telle adaptation, basée sur la parole. Celle-ci fait parfois mouche. Le chat, qui parle, est un formidable instrument comique. Amoureux fou de sa belle maîtresse aux formes voluptueuses, menteur, blasphémateur, maîtrisant parfaitement la dialectique judaïque, il offre les meilleurs moments du scénario. Un chat athée qui fait douter rabbin, prêtre et imam, c’est forcément un ressors à gags.

Sfar, en coupant une grande partie de son récit, ne perd pas son message sur le bas côté des sentiers africains. Il a su quand même garder quelques bonnes répliques et les meilleures idées de la BD. L’impertinence du félin n’est là que pour souligner la force supérieure de l’amour sur celle contraignante de la croyance en un Dieu. Mais cet éloge par les mots enferme le film dans une absence d’action. Il y a des moments d’ennui qui étonnent presque. Le rythme manque malgré quelques bonnes séquences. La satire des religions aurait pu entrainer davantage de profondeur. On reste ici dans l’illustration.
Il faut attendre le voyage africain pour que l’intérêt revienne. En se moquant des racistes de l’époque (le guide de Citroën, les anthropologues, Hergé avec Tintin), Sfar se remet sur le droit chemin, aidé par ses héros sages, fous, illuminés, violents, conservateurs, passionnés. Cette ode à l’Afrique par un Cheikh, un Rabbin, un Slave (Chagall dans l’âme et double de Sfar) et une « négresse » nous emmène dans un imaginaire bien plus percutant que les détours ronronnant qu’empruntaient jusque là le scénario. Le dessin animé s’offre alors une allégorie visuelle dans une terre promise pas forcément aimable. Le mythe permet au film de se déployer dans un registre plus intéressant. La palette chromatique s’enrichit. On quitte l’aspect feuilleton animé pour France 3 pour entrer dans une belle histoire subtile pour adultes.

L’impression globale est cependant d’avoir vu un film bancal, avec des chansons d’Enrico Macias un peu détonnantes, une articulation grippée des conflits et des protagonistes qui ne parviennent pas à s’imposer. La magie est absente, il ne reste donc qu’un mirage. Et le sentiment d’un film qui a manqué sa cible, qu’elle soit drôle ou émouvante.
 
vincy

 
 
 
 

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