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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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The Trip
/ 2010
20.07.2011
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VOYAGE ACIDE
« Coogan est un salaud, d’après son père. »
Décidément, la télévision peut parfois fournir une formidable matière cinématographique. Un peu dans la lignée du Carlos d’Olivier Assayas, conçu comme une mini-série pour Canal +, et sorti en salles dans une version courte qui connut un joli succès public et critique, The trip condense en moins de deux heures une mini-série créée sur la BBC, et c’est jubilatoire.
Déjà, le duo formé par Steve Coogan et Rob Brydon (et déjà exploité par Winterbottom dans Tournage dans un jardin anglais) fonctionne admirablement. A la fois rivaux et complices, complémentaires et inconciliables, les deux hommes multiplient les joutes verbales, les imitations plus ou moins réussies et les conversations futiles devant des plats ultra raffinés et vraisemblablement succulents auxquels ils prêtent souvent une attention toute relative. Le tout dans une apparence de joyeux n’importe quoi.
Leurs échanges (improvisés pour une grande part) sont ainsi bourrés de références cinématographiques, parfois difficiles à appréhender pour un public français, mais globalement irrésistibles. On pense aux imitations de Michael Caine et d’Al Pacino, mais surtout aux variations infinies sur une réplique tirée d’un épisode de James Bond (L’homme au pistolet d’or) et initialement prononcée par Christopher Lee (dans le rôle de Scaramanga). Ces délires d’improvisation donnent naissance à quelques séquences hautes en couleurs, comme la reprise par les deux acteurs d’une version toute personnelle de The winner takes it all d’ABBA, mais laissent aussi parfois paraître une certaine fragilité qui semble révéler les failles et les angoisses des personnages face à leur avenir professionnel.
Car toute l’autodérision dont font preuve Coogan et Brydon ne serait qu’une farce potache si elle ne dévoilait pas en parallèle une réflexion douce amère sur la condition d’artiste. C’est d’autant plus saisissant, voire touchant à certains moments, que les deux acteurs semblent jouer leur propre rôle (en réalité une version "fictionnalisée" de qui ils sont réellement). Ce jeu de miroir (l’acteur face à son double de pellicule) apporte une profondeur supplémentaire au récit sans en faire des tonnes. L’essentiel reste ainsi dans la relation ambiguë qui lie les deux hommes, et dans leurs tentatives respectives pour se donner l’illusion d’être meilleur que l’autre. Fidèle à un certain esprit purement britannique, et à l’humour qui va avec, Winterbottom entremêle étroitement comédie humaine et satire racée, sans jamais se départir d’une décontraction classieuse. Le réalisateur a parfaitement intégré qu’au cinéma comme dans les voyages, ce qui compte n’est pas tellement la destination (le carton "fin" à l’écran) que le plaisir ressenti à chaque étape du périple.
MpM
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