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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Millénium, les hommes qui n'aimaient pas les femmes (The Girl With The Dragon Tatoo)
USA / 2011
18.01.2012
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LISBETH II
«- J’ai oublié de te demander : tu aimes la sodomie.»
Etait-ce bien utile ? Après les livres, la série TV, la trilogie cinématographique nordique, et en attendant les BD, voici la version « made in Hollywood » du premier volet de Millénium (Les hommes qui n’aimaient pas les femmes). Avec David Fincher aux commandes, cela promettait une œuvre peut-être différente, relue à travers le prisme d’un cinéaste doué, aimant flirter avec les narrations complexes.
Le scénario de Steven Zaillian ne s’écarte pourtant pas beaucoup de la version originale. La chronologie reste identique. Les deux méthodes d’investigation sont respectées. Si l’on ajoute que les décors sont les mêmes (afin de coller à l’authenticité du livre), un sentiment familier nous imprègne très tôt dans le film. Aussi, trois ingrédients peuvent faire la différence et créer une véritable œuvre singulière. La direction artistique, l’interprétation et la mise en scène.
Le générique donne la couleur. Digne d’un James Bond, sublime, tout noir et flammes. La musique de Trent Renzo et Atticus Ross, aux accents métalliques, isntalle une ambiance angoissante et tendue. De ce côté là, le film ne décevra jamais. Le cinéaste a voulu un film froid, élégant, moderne. Les paysages suédois l’ont inspiré.
En journaliste affranchi, Daniel Craig compose l’un de ses meilleurs personnages sous le regard de Fincher qui n’a pas hésité à l’empâter, le foutre en slip (noir, nous sommes à Hollywood, il faut rester pudique), et à lui enlever toute action qui rappellerait ses rôles précédents. Il est un enquêteur, pas un tueur. Craig impose un flegme extérieur et ses tourments intérieurs avec subtilité. Les seconds-rôles sont parfaitement choisis, de Plummer à Richardson en passant par Skarsgard et les moins connus : ils incarnent idéalement cette famille en décomposition, rongés par leurs vies, leurs erreurs, leurs secrets. Tous pourris ou presque.
Reste Rooney Mara pour le personnage si attendu (si convoité) de Lisbeth Salander. Après une Noomi Rapace charismatique et dévoratrice, difficile de faire jeu égal. De fait, malgré tout son talent, Mara ne parvient pas à nous marquer comme la scandinave nous avait bluffés. Plus belle, certes, Rooney Mara semble aussi plus fragile, trop vulnérable, malgré son air dur. Elle a la même coiffure, mais les cheveux (et les tatouages, le cuir, la moto…) ne suffisent pas à la rendre aussi imprévisible. Mara semble trop candide, trop fine, trop « petite fille perdue. Elle devient même le point faible du film, si l’on a vu la trilogie suédo-danoise.
Il faut avouer qu’on s’ennuie fermement à certains moments. Très long, le film s’étire de telle manière qu’il laisse retomber les rares moments de tension.
David Fincher déploie pourtant tout son savoir-faire pour réaliser un thriller clinique et précis à l’instar de Zodiac (le découpage est d’ailleurs assez similaire). La mise en scène est soignée à la percetion, séduisante. Mais il lui manque un soupçon de rythme et de complexité pour nous fasciner. Ce manque de cœur, de corps, de chair s’ajoute à l’absence d’une vision politique du sujet qui aurait pu le distinguer du premier film ou le rapprocher de la personnalité de l’auteur du livre, Stieg Larsson. Millénium est froid comme la neige suédoise, sans le charme « européen » que peut dégager ce pays. Il semble bien plus à l’aise avec le sordide des tempéraments, les faits abjects, les actes répugnants. Il manque, hélas, une dynamique, qui nous emporte dans cette folie de cinglés, un regard engagé sur ces puissants « intouchables », impunis. Bref, ça n’a pas la virtuosité de Social Network, mais Fincher évite le classicisme plan-plan de Benjamin Button.
Millénium est un thriller glacial où l’impuissance domine les obsessions de chacun. Seul le personnage de Lisbeth, et c’est sans doute pour ça qu’on l’aime tant, paraît être maîtresse de son destin.
Si le réalisateur se régale avec des scènes SM qui le sortent de la « lissitude » hollywoodienne, le spectateur doit attendre la moitié du film pour palpiter par intermittence. L’ensemble, très cérébral, donne un résultat assez inégal. Ni blockbuster, ni film noir, un peu des deux. Les séries TV du genre sont beaucoup plus féroces et captivantes. Fincher a sans doute voulu réaliser un polar traditionnel, mais en l’étirant au maximum, pour ne pas trop trahir le livre, il freine le suspens et empêche tout crescendo. Exactement l’inverse de Panic Room, autre huis-clos dans une maison idéale et labyrinthique, où le réalisateur parvient – enfin – à nous ébahir avec un jeu de chat et de souris masochiste (« on a tous des pulsions. Satisfaire la mienne nécessite plus de pulsions »).
Millénium souffre du même syndrome que les récentes adaptations de best-sellers. Trop fidèle au roman, pour ne pas effrayer les fans. Pour un cinéaste tel que Fincher, c’est décevant. Bien sûr, parce que c’est Fincher, le film est largement meilleur que beaucoup de ratages (on pense à Da Vinci Code).
vincy
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