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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Another Happy Day
USA / 2011
01.02.2012
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WE NEED TO TALK ABOUT FAMILY
«- Désolé, mais il regarde Fox News en dormant, ce qui est la définition exacte du zombie.»
Un scénario élégamment écrit. Une pléiade de très bons acteurs jubilant avec leurs personnages suffisamment névrosés pour que cette famille dysfonctionnelle sot incarnée. Another Happy Day, dans la lignée des drames foutraques récents du cinéma indépendant américain (The Kids are all right, au hasard), remplit son contrat : un portrait d’une Amérique en pleine recomposition, ou décomposition dans certains cas. Le poids de l’héritage est lourd à porter. Et ce film ne dit rien d’autre : on ne choisit pas sa famille, son histoire, mais on peut, douloureusement, s’en défaire. Ici, on se transmet les séquelles.
Le mariage est un prétexte pour réunir tous les éléments disparates de ce foyer américain traditionnel et opulent. Un enterrement aurait pu faire l’affaire, mais « la mort est un lien qui unit plus fortement les familles que l’amour. » Un prétexte qui rend les relations telles qu’elles sont : factices. S’il n’y avait pas le mot « famille » pour les rassembler, ces gens là ne se parleraient pas. D’anecdotes en gaffes, d’humiliations en mensonges, de colères en galères, ces trois générations coexistent dans une ambiance explosive.
On aurait aimé que ça soit un peu plus vif. Un peu plus dynamité. Le drame rend la narration plus facile que la comédie. Le réalisateur Sam Levinson, fils de Barry Levinson (Rainman), freine les élans burlesques et les délires prêts à s’emballer. Cela ne l’empêche pas d’offrir un film tragique et cocasse tant sa chorale est timbrée. La folie, ça swingue naturellement. Surtout avec des comédiens comme la magnifique Ellen Barkin, la toujours impeccable Ellen Burstyn, une Demi Moore grandiose vipère difficile à cerner, une Kate Bosworth de nouveau épatante en fille blessée. Celui qui fait le spectacle reste l’agaçant Ezra Miller. Il est, à l’instar d’un DiCaprio dans ses premières années, doué pour les rôles perturbés (et perturbateurs). Magnétique, le jeune homme n’a peur ni de l’abandon (sous l’effet de médicaments) ni du ridicule (sous l’effet de l’alcool). Il est la maladie de cette famille, le parfait symptôme, au bord de l’autodestruction. Lui et Barkin forment un duo mère / fils assez rare, qui éclipse par leur charisme leurs collègues, pourtant bons. Leurs trahisons et leurs défiances rendent le récit intense et parfois terrifiant, tant il va à l’encontre de la parfaite petite famille modèle américaine. Mais c’est leur union qui forment la plus belle arme : leur rage, enfouie, permettent d’exhumer les rancoeurs que chacun tait.
Le scénario fait le reste, à défaut d’un montage très maîtrisé. Les quiproquos pourraient même donner raison au titre du film. Mais celui-ci est bien ironique tant l’amertume se répand séquence après séquence. L’angoisse monte, alimentée par des ploucs, des bitches, des réacs, … on comprend que la mutilation, la drogue et l’alcool soit un substitut pour survivre. Les sarcasmes, nombreux, hilarants par occasion, ne sont que la traduction d’une ironie lucide. Another Happy Day est subtil, mais le film souffre de quelques trous d’air qui plombent l’atmosphère, moins déjantée qu’espéré. Le film aurait pu nous faire jubiler, mais à certains moments il nous oublie.
Le dernier tiers du film sauve ces manques. Le mariage en lui même est cul cul et kitsch. Une véritable satire tant il ressemble à un enterrement rempli de clichés et de bons sentiments. Cynique, certes. Mais Levinson opère alors un virage pas trop brusque vers le burlesque à la Blake Edwards, avec une succession de scènes qui font monter la pièce. Crescendo, le rose vire au rouge. La folie de deux hommes illustre la dévastation de leur entourage. Chacun son chemin, peu importe les opinions des autres. Droit dans l’arbre ou vers l’océan. Les deux plus clairvoyants préfèrent larguer les amarres en quête d’une ultime liberté. La musique accompagne cette accélération. Et en effet, hélas, la mort s’avérera plus forte que l’amour. Et les vraies monstres finiront seuls. Levinson signe un film profondément humain.
vincy
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