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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Albert Nobbs
USA / 2011
22.02.2012
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IN(TRO)VERTI
«- Parfois je pense que vous avez un grain. »
Albert Nobbs se résume à son titre. Le prénom et le nom d’un « homme » incarné par une femme. Au delà de ce subterfuge, le film n’a pas grand chose à montrer ou à partager. L’intérêt de l’œuvre repose essentiellement sur l’immense talent de sa comédienne métamorphosée (Glenn Close demeure l’une des plus grandes actrices hollywoodiennes de ces 30 dernières années) à faire croire au spectateur, mais aussi à ses semblables, qu’elle est née avec un sexe masculin.
Pour le reste, le scénario s’étire autour d’une histoire peu palpitante. Dans cet hôtel étouffant, qui aurait pu être une maison close ou un château, les petits drames ordinaires ne suffisent pas à tisser une histoire et encore moins à véhiculer une émotion. Il y a pourtant, en arrière plan, de belles idées : une lutte des classes avec cette élite arrogante, cette patronne cupide, ces précaires virés du jour au lendemain. L’esclavagisme n’est pas si loin. Pour survivre dans ce monde où l’on licencie abusivement ou pour vivre librement leur homosexualité, certaines femmes se transformaient en homme. Tootsie inversé.
Mais le film ne va pas beaucoup plus loin : les seconds rôles sont assez vite caricaturaux, hormis celui de Janet McTeer, fabuleuse. Leur séquence où les deux femmes qui s’affichent comme des hommes et décident de s’habiller comme des femmes en font des travestis burlesques qui en dit beaucoup plus sur notre perception de l’autre que toutes les autres scènes du film. Un jeune Apollon au physique parfait, un Jonathan Rhys Meyers dépravé « as usual » (certes avec du bidon), une jeune oie blanche sans relief… Le lesbianisme dans une société conservatrice est effleuré. La perte d’identité (ou le trouble) est à peine esquissée. Albert Nobbs n’est une longue chronique assez ennuyeuse, hormis quelques situations teintées d’ironie. Le récit l’emporte sur le drame, s’empêchant d’être percutant ou passionnant. Même le petit chantage tombe à plat. La petite escroquerie prend d’ailleurs trop de place dans la narration quand on s’attend à un glissement vers la folie d’Albert Nobbs. Cela tient aussi au personnage principal. Cet « homme » si délicat, sobre, méticuleux, discret, qui a tant enfoui sa personnalités dans sa gaine, que rien ne se libère. Les événements surviennent mais on y reste indifférent. Dès que Close disparaît de l’écran, on s’égare.
Ce travesti sans racines aurait pu nous emmener dans une zone grise qui renvoie aux combats actuels sur l’égalité des sexes. Mais Albert Nobbs n’a aucune ambition autre que de prouver, une fois de plus, que Close sait tout jouer, même un mec.
vincy
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