Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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La Vierge, les Coptes et moi...


France / 2012

29.08.2012
 



VOIR LA VIERGE ET SOURIRE

Le livre Bye Bye Bahia



"En théorie, tous les Egyptiens snt frères. En pratique, les musulmans n'aiment pas les coptes, les coptes n'aiment pas les musulmans, et tout le monde déteste les juifs."

Le titre, déjà, fait sourire. La Vierge, illusion fédératrice et maternelle. Les Coptes, communauté ancienne et mystérieuse. Moi, alias le réalisateur, d’origine Copte, qui ne croit pas en la Vierge (mais a la foi dans le cinéma, autre illusion). Mélange de fiction, de documentaire et d’autofiction, cette trinité, entre comédie sensible et regard attachant sur un pays et ses peuples, flirte avec le saint esprit de Woody Allen, un making of cauchemardesque à la Terry Gilliam, et un reportage qui multiplie les peines.

La Vierge, les Coptes et moi, tragicomédie subtile sur l’impossibilité de prouver une vision collective et la capacité du cinéma à se substituer aux croyances les plus ancestrales, est une œuvre gigogne aussi passionnante que drôle.
Namir Abdel Messeeh livre un film en quatre actes, comme s’il le construisait devant nos yeux : le pitch, les repérages, la pré-production et la production. Et tous les obstacles qui vont avec : ramadan, retour aux sources, pression familiale, susceptibilité religieuse, producteur qui lâche l’affaire…

Rempli d’un humanisme non forcé, le film, centré sur le réalisateur (il se met en scène comme un Michael Moore investiguant), est, au final, un cadeau généreux à tout ceux qu’il a croisé. S’il veut comprendre comment une hallucination collective a pu exister, il va vite déchanter. Il saisit vite que le sujet de son documentaire n’est pas dans une apparition de la Vierge mais dans la découverte d’une communauté souvent réprimée, voire agressée, dans un pays essentiellement Musulman. Il va aussi deviner qu’un mirage produit des miracles. Peu importe le réalisme, les faits. Qu’elle soit un effet d’optique ou un effet spécial de cinéma, une apparition de la Vierge produit un émerveillement.

Messeeh part du je pour aller vers le nous. Il arpente le chemin le plus tortueux pour atteindre son sommet. Acquiert sa liberté au prix fort (son producteur quitte le projet en cours de route) pour fabriquer son objet cinématographique difficilement identifiable mais si personnel. Un film d’auteur (dans tous les sens du terme) qui prend de la hauteur non pas avec l’élévation d’une icône mais par la sublimation d’un art : le cinéma comme bible, la projection comme messe, l’image comme idolâtrie.
Laïque se moquant des superstitions, réalisateur affligé par l’absence de vision de ses financiers, fils ayant foi en sa mère qui a foi en la Vierge, français d’origine Copte, occidental en monde arabe, il passe sûrement à côté de l’essentiel pour un historien, un théologien, un artiste. Mais il vise juste, avec un regard de documentariste, curieux, et une envie de cinéma, palpable, en faisant de son film hybride un tableau naturaliste blasphématoire et une esquisse fantastique spirituelle. La Vierge, les Coptes et moi aurait pu être très sérieux. Il ne s’empêche jamais d’être drôle, fouillis, bordélique, artisanal. Il aurait également pu être raté; mais, malicieuse, la comédie, loin du produit que voulaient formater les producteurs, s’avère réjouissante. Sans doute parce que l’apparition de la Vierge est un mythe auquel les gens avaient besoin de croire, il improvise un cadeau, une reconstitution, avec ses outils, d’une scène qui n’est qu’un souvenir évaporé. Elle devient alors réelle, et, grâce au cinéma, le réalisateur comprend qu’il est Dieu en son village.
 
vincy

 
 
 
 

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