Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Happiness Therapy (Silver Linings Playbook)


USA / 2012

30.01.2013
 



BREAKDOWN WITH TIFFANY





« - Quoi de plus américain qu’un cowboy ?
- Benjamin Franklin.
»

David O. Russell a toujours été inégal. Et avouons-le ce sont souvent ses films les moins « populaires » qui nous séduisent le plus. Happiness Therapy ne fait pas exception. En flirtant avec les comédies d’Albert Brooks, sans le génie du gag ou de la réplique, ou de Alexander Payne, sans la magie de son humour élégant, le cinéaste se piège avec un scénario convenu, happy end compris, et un découpage qui étire inutilement une histoire prévisible.

Voici pour les petites méchancetés, qui égratignent une œuvre qu’on apprécie par ailleurs. Cependant, Russell a conservé son talent à créer des personnages insolites, barrés, normalisant les névroses de chacun et cassant des stéréotypes du cinéma américain. Il n’y a qu’à voir la famille du bipolaire toujours prêt à disjoncter Pat (Bradley Cooper, comme on ne l’a jamais vu, et c’est un compliment) : le brushing de la mère sorti d’une sitcom des années 80 (Jacki Weaver, excellente), les tocs de son père (De Niro, formidable entre son cabotinage habituel et ses récents rôles tendres et sensibles) ou encore son meilleur ami (Chris Tucker, loufoque comme il faut). Il sait installer les malaises, la violence sourde, les frustrations, les remords ou les rancoeurs, mais aussi la chaleur humaine, l’amour filial en quelques secondes, grâce à des acteurs qui n’en font pas trop tout en donnant le meilleur d’eux-mêmes.

Au milieu des fixations, angoisses et obsessions de ces Américains moyens écrasés par le système et un schéma de vie étouffant (dettes, mariage, enfants, … le modèle classique), le cinéaste glisse son habituel cynisme. Mais aussi un peu d’optimisme. Il lui suffit d’une femme, Tiffany. Toute aussi « détraquée », mais lucide, presque nihiliste, positive et contradictoire, charmeuse et entière : cette jeune veuve aide à renouer avec le réel, même quand elle a des excès de folie pure. Jennifer Lawrence épate avec son bagou, un regard profond et mystérieux, une voix cassée envoûtante,, et finalement elle porte sur ses épaules tout l’aspect comique et la parole juste du film. Elle est l’élixir de jouvence d’une famille qui se décrépit sous ses vieilles habitudes. Elle amène de la subversion, de la lumière dans un foyer où la négativité et le crépuscule envahissent les murs.

Cependant, Russell ne nous bassine pas avec un discours « illuminé » ou « positiviste ». Dans cette hystérie incontrôlable, il prend soin de flinguer des références intouchables comme Hemingway, de se moquer des rites bestiaux des fans de sport, … Mais il veut aussi croire aux solutions les plus saines : le sport plutôt que les médocs, la famille plutôt que les médecins, le dialogue et la différence de points de vue plutôt que la soumission à un schéma.

Dans cette histoire de réinsertion « pour tous », où chacun cherche à respirer dans un monde oppressant, la gentillesse semble une valeur immuable. La franchise aussi. Le duo Cooper/Lawrence se distingue par le rejet du mensonge. Dommage que le rythme ne soit pas soutenu de bout en bout pour nous embarquer dans ce grand huit psychologique. Sur la forme, le film n’est pas aussi cinglé que ses deux « héros », ni même que les précédents films de Russell, en quête de normalité lui même. Veut-il s’insérer dans le « corpus academecus » hollywoodien ?
Mais dans ce cas pourquoi nous infliger tous ces bavardages où la rue et les lieux publics servent de théâtre de scènes de ménage. Comme Pat, le cinéaste a peur de mettre de la vie dans tout cela et nous noie sous les mots. Il en oublie son anticonformisme habituel, alors qu’il le combat formellement depuis ses débuts. Une contradiction qui créé une césure dans son œuvre. Chacun sa thérapie, mais parfois l’ennui pointe. On attend des pétages de plombs et on assiste à des litanies existentialistes. Il faut patienter jusqu'au dernier acte pour que les émotions des uns et les vérités des autres se révèlent dans un beau final, proche des « screwball comedies » d’antan. Le feeling passe enfin après une longue interruption plombée par une surdose de digressions.
Il ne suffit pas d’un scénario bien écrit, de personnages attachants et d’un sujet porteur pour élancer un film droit dans le mur d’un happy end. Sinon la thérapie, trop longue, trop indécise, s’avère frustrante ou inachevée.
 
vincy

 
 
 
 

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