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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Hijacking (Kapringen)
/ 2012
10.07.2013
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OTAGES AU DÉSESPOIR
Le réalisateur Danois Tobias Lindolhm – scénariste, notamment, du film La Chasse de Thomas Vinterberg ou de la série "Borgen" – a fait d’Hijacking un cas de conscience dont la structure événementielle repose sur des réalités géographiques, économiques et politiques connues. L’articulation tient du filigrane, la scénarisation ne débouchant sur aucun didactisme géopolitique à même de dénoncer ou d’exonérer les commanditaires de tels actes. De fait, il n’y a aucune tentation vers le choc des cultures entre un nord omnipotent et un sud asservi. Le discours manichéen a été évité. L’extra humanisation des différents protagonistes devant l’adversité, non.
Que filmer, en effet, lorsque des pirates – ici somaliens – s’emparent d’un cargo pour prendre en otage son équipage ? L’inéluctable réalité d’une situation complexe entre deux parties qui vont devoir se parler à coups de bluff, de négociations, d’attente. Lindolhm fabrique avec habileté un thriller prenant dans un double huis clos tendu, étouffant, maîtrisé. Le jeu de rôles s’affiche dans la rigueur d’une mise en scène réaliste, proche du documentaire, toujours obnubilé par les regards, cette expression si humaine. Et ça marche ! Le temps qui passe devient alors la compagne des lieux investis (cargo, salle de travail de la compagnie), influe sur les comportements des otages, des preneurs d’otages, comme du PDG de l’armateur.
Le drame se noue en direct dans un mano a mano communicationnel de plusieurs mois et distant de plusieurs milliers de kilomètres. Le superficiel s’efface au profit d’un combat âpre où il ne faut rien lâcher sur les revendications des pirates sans pour autant risquer la vie des otages. L’équilibre est précaire. La balance vie humaine - argent dépensé tient de ligne rouge absolue. Le cas de conscience s’empare alors du PDG, volontaire dans l’attitude, froid sur les négociations, sincère dans son empathie envers son personnel. Le cinéaste a tranché. Il est le héros du film puisqu’il représente la complexité d’une situation ambiguë (pourquoi ne lâche-t-il pas la rançon demandée) qui risque à tout moment de déraper.
Son personnage, à des années lumières du cuisinier retenu sur le cargo, expose admirablement bien le ton d’un film carré ou rien ne dévie de la trajectoire initiale. Chacun ressortira bouleversé de cette épreuve. Mais rien, hélas, ne fera changer le cours des choses, situations inextricables où l’urgence répond à l’urgence.
geoffroy
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