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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Elysium
USA / 2013
14.08.2013
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MAD MAX
« Faire de chacun un citoyen d’Elysium »
Elysium scintille dans l’espace comme une bague de diamant : à la fois utopie pour les pauvres restés au sol et station réservée aux nantis. Avec Neill Blomkamp aux commandes de ce vaisseau spatial, on s’attendait à décoller et sortir des territoires familiers de la science fiction ordinaire.
Après l’audacieux District 9, on pouvait s’attendre à une œuvre ambitieuse avec cet Elysium. Hélas, nos espoirs se désagrègent avant même la sortie de la stratosphère. Car Blomkamp a sérieusement manqué d’imagination pour commencer : le Los Angeles du XXIIè siècle ressemble à n’importe quel bidonville crade et poussiéreux actuel et la cité idyllique en orbite n’est autre qu’une de ces cités où se barricadent l’élite à Sao Paulo, Mexico ou Mumbay. Les pauvres – qui parlent aussi espagnols – sont donc relégués en bas, dans des villes surpeuplées, respirant un air très pollué tandis que les riches – qui parlent français – vivent dans la verdure, avec de la musique classique pour l’ambiance. Cet aspect binaire sert hélas de piliers (fragiles) à un film dont la construction est bancale.
Il ne suffit pas, en effet, d’écrire un film dénonçant les injustices et les inégalités sociales, évoquant l’immigration clandestine et la déportation (les Américains y ont même vu le film le plus socialiste depuis des lustres) pour réaliser une œuvre engagée (et à défaut subversive). Avec un préambule aussi laminaire qu’imprécis, les bases sont mal jetées. Jamais le spectateur ne comprendra pourquoi l’élite a délaissé les classes moyennes et précaires jusqu’à les asservir. Et l’épilogue (l’égalité des droits et surtout l’accès à la même santé pour tous) rajoute à cette confusion : tous citoyens égaux mais chacun dans son monde ?
Cela ne s’arrange pas avec les personnages : superficiels, presque caricaturaux, sans une once de relief pour les singulariser ou éprouver une quelconque empathie, ils n’apportent aucune crédibilité à une histoire qui ne sait pas quelle direction prendre. Ainsi, au début du film, Matt Damon se la joue insolent et impertinent, plutôt heureux dans sa vie d’ouvrier entouré de potes. Tel un superhéros, le voilà bien amoché, et même condamnée par une irradiation fatale qui l’oblige à endosser un costume robotique. Sa déshumanisation – il perd son sens de l’humour au détriment de sentiments niais et d’un sérieux refroidissant – ne permet pas d’adhérer complètement à sa destinée de sauveur du monde. D’autant qu’on ne lui oppose même pas Jodie Foster, sorte d’Hilary Clinton glaçante, puisque la confrontation n’arrivera jamais. Blomkamp - à la manière d’un Nolan dans The Dark Knight Rises qui avait éjecté le vrai méchant un peu trop brutalement - loupe son final en préférant un combat de coqs (dont l’un n’est pas loin de rappeler le personnage de Tom Hardy dans le troisième Batman justement), banal et assez mal filmé. Il y avait tellement plus de potentiel : psychologique, politique, ou même mystique. Mais Elysium se contente d’être une histoire simpliste au lieu de nous emporter dans une folie bien réelle.
On nous afflige ainsi quelques gueules qui explosent, de l’arme blanche à foison, des effets visuels qui justifient le budget. Mais pourquoi ? Un récit sans rebondissements réels où les enjeux sont brouillons. De quoi s’agit-il ? Un pamphlet « socialiste » ou un rébellion contre la tyrannie ? Une bataille personnelle, l’histoire du Cheval de Troie revue et corrigée ? Un complot politique ? Une lutte contre un compte-à-rebours qui mène le « héros » à sa survie ou à sa mort ? On croyait qu’on allait être transportés par cette aventure d’un homme qui cherche à survivre à tout prix, mais, peu limpide, la mise en scène de Neill Blomkamp transforme les imbroglios, politiques ou individuels, en simple collage d’histoires mal imbriquées les unes dans les autres. Le film en devient évasif, un peu lunatique, pour ne pas dire fumiste, là où on rêvait d’évasion, de réflexion et de métaphores.
D’Oblivion (Elysium semble le cousin ancestral du Têt) à Total Recall (le remake avec son monde austral pour les sous classes et son monde septentrional pour les chanceux), il n’y a rien de bien neuf sous le soleil de l’anticipation hormis des scénarios de plus en plus incohérents. Hollywood manque d’inspiration. Elysium, aussi divertissant et bien produit soit-il, reste une production peu crédible, et rarement captivante. La narration s’est perdue au fil de l’histoire (pression des studios ?). Blomkamp a peut-être préféré sacrifier son talent pour pouvoir survivre ou tout simplement se faire une place dans cet univers impitoyable du 7e art industriel. Pour le coup, ça ne lui sera pas fatal. Mais cette œuvre de SF se fondra dans la mémoire collective des cinéphiles, indistincte. L’ascenseur social est peut être en panne, mais l’ascenseur spatial aussi.
vincy
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