Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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9 mois ferme


France / 2013

16.10.2013
 



LA JUGE ET L'ASSASSIN





Albert Dupontel, réalisateur, est un pitre. Un vrai. Au sens noble du terme. Sa force comique, plus ou moins au vitriol selon les films, se décuple toujours au travers des travers d’une société qu’il perçoit – décrit – comme injuste, discriminante, dure, produisant de la marginalité à tous les coins de rue. Peu importe, alors, la façon dont Dupontel angle ses histoires puisqu’il les façonne toujours par le biais d’un décalage du réel remplit de marginaux, excentriques borderline, risibles, inadaptés, tragiques, émouvants, caricaturaux. Avec 9 mois ferme, Dupontel synthétise dans un film-somme étonnamment ramassé (1 h 20) les différentes directions prises au cours de ces précédents longs-métrages.

Son cinéma, reconnaissable entre mille, s’affine à chaque réalisation, se perfectionne également, et, chose plaisante à constater, donne le "la" d’un rythme soutenu qui en appel aux zygomatiques. C’est donc drôle, acerbe, bourré d’idées de gags plutôt farfelus comme de personnages hauts en couleur. La farce est grosse mais pas grossière, volontairement exagérée dans ses situations parfaitement raccords avec l’idée-force d’une narration où l’institution Justice en prend pour son grade.

Si Dupontel fait du Dupontel, il n’oublie pas de travailler ses fondamentaux, dialogues en tête. Ceux-ci font mouche et servent sur un plateau des acteurs au diapason embarqués dans cette aventure pour le moins folklorique qui voit une juge psychorigide – frigide ? – tomber enceinte par accident le soir d’un nouvel an un peu trop arrosé. Ce point de départ improbable sonne la charge, sans autre forme de procès, d’une satire inspirée, dixit le réalisateur, par le film de Raymond Depardon La 10ème chambre – instants d’audience. La proposition cinématographique aussi intéressante soit-elle, n’a rien de révolutionnaire. Question de traitement. Néanmoins, elle pose avec force talent une constance, celle d’un amour sans borne à la comédie, la vraie, qui triture, ose, provoque, se moque des institutions comme de notre bêtise, sans tomber dans la critique facile ou de circonstance du mauvais film anar pas rigolo pour un sou.

Qu’est-ce qui fait de 9 mois ferme une franche réussite ? Assurément son côté burlesque. Entre l’humour des Monty Python et celui, plus cartoonesque, d’un Tex Avery (ah, la scénette de la cuisine !). Ainsi, la construction privilégie la mécanique de la scène où chaque pièce du puzzle est à sa place. Les effets de caméra font le reste. La conjugaison est parfaite, s’accorde pour ce qu’elle est, sans fioritures ni excès de m’as-tu vu. Le principe, fort simple dans son objectif, suscite peu ou prou les mêmes réactions. Le rire des spectateurs. Soit la promesse tenue par le réalisateur depuis presque vingt ans.

Certains resteront sur le bas-côté. Il faut, en effet, pouvoir entrer dans le délire d’un bonhomme usant à loisir avec le politiquement incorrect. Mais que le film fait du bien à la comédie française, genre si prolifique devenu depuis quelques années atones par manque d’ambition. Paresse quand tu nous tiens… Heureusement, Albert Dupontel se fout du star-system, n’aime pas la télé comme le vedettariat. Libéré de cette contrainte de l’image il façonne comme bon lui semble sa farce corrosive en reprenant, comme jadis tous les grands du rire, un personnage fétiche. L’asocial un peu voyou, un peu bêta mais au final pas si mauvais est de retour. Par lui comme par les trognes qu’il met en scène (attention aux guest), il rit de ce monde bien fragile où tout ne tient qu’à un fil.

Reste la très bonne idée du film en la personne de Sandrine Kiberlain. Contrepoint parfait au délire trash de notre cher Dupontel, l’actrice amène sa fraîcheur ingénue vis-à-vis de la farce avec une grande sobriété. Elle crée le décalage nécessaire pour assurer une certaine véracité dans les propos/situations développés par un cinéaste s’amusant comme un petit fou. Avec elle le burlesque domine sans jamais forcer le trait de la caricature. Si cela est moins vrai dès que Bob/Dupontel entre en scène, leur relation tient la route jusqu’au savoureux dernier plan plein de promesse et d’espoir.
 
geoffroy

 
 
 
 

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