Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Casse-tête chinois


France / 2013

04.12.2013
 



MODERN FAMILY





« En fait ce qu’il te faut c’est un mélange de nous trois. »

L’attachant Xavier (Romain Duris) revient dans un troisième volet se casser la tête avec ses poupées russes. Comme on pouvait le penser, le récit de Casse-tête chinois se concentre sur les femmes proches de ce post baby-boomer cherchant son identité masculine et sa place dans la société : Martine (Audrey Tautou), Wendy (Kelly Reilly) et Isabelle (Cécile de France). On ne retrouve donc pas les autres personnages de L’auberge Espagnole (2002) et recroisés dans Les Poupées Russes (2005). Une rupture dans la continuité. Comme si les amitiés de jeunesse avaient finalement disparu dans le tri sélectif du temps.

A la manière de Truffaut qui suivait la vie d’Antoine Doinel (cinq films au total), Klapisch tente d’écrire un roman générationnel, où la fidélité est aussi compliquée qu’un statut marital sur Facebook et où les frontières sont abolies. Mais, ce troisième volet réussi n’est pas construit comme une suite au sens traditionnelle du terme. S’il s’agit bien des mêmes personnages, vieillis de dix ans, c’est une nouvelle histoire que l’on a devant les yeux. Le monde a changé, les ambitions aussi. Casse-tête chinois, formellement, se rapprocherait plus de l’esprit Auberge Espagnole. Plusieurs références y sont faites, comme cette apparition d’un philosophe allemand à la manière de Erasme dans le premier volet. Les étudiants qui croyaient à l’utopie européenne sont devenus d’abord de jeunes adultes emplis de rêves. Ici ce sont des quasi quadras confrontés à la réalité, au temps qui passe, aux désillusions aussi.

La particularité de Casse-tête Chinois qu’il est tourné à New York. Il est donc soumis aux lois, assez strictes, des « unions » du cinéma américain (syndicat des films aux USA). Il en découle une impression singulière, mais pas mauvaise pour autant, d’avoir en face de nous un mélange abouti entre un film américain et film français. L’énergie de l’un et le charme de l’autre. Ce « mix » permet nous plonger au plus profond de l’aventure New-Yorkaise, toujours loin de la vie rangée des bureaux « un peu austère » qu’il fuit dès la fin du premier épisode. La précarité, la fragilité, l’instabilité sont les moteurs de cette trilogie où le bonheur, jamais idéal, reste l’objectif. Comme s’il fallait passer par des couacs pour que l’orchestre trouve la bonne harmonie. Comme s’il fallait des échecs pour trouver la bonne alchimie.

On retrouve ainsi, avec plaisir, des acteurs bien dans leurs baskets. Il y a une atmosphère de légèreté et de bien être. Contrairement à beaucoup de « sagas » ou des « séries », le désir d’en être est palpable, la joie de se retrouver est évidente. Sans doute parce que Klapisch avait l’envie de les faire évoluer, de leur offrir de nouveaux enjeux.
Et puis cela lui permet d’évoquer d’autres sujets contemporains : le père divorcé, l’homoparentalité, l’immigration, la place de l’homme, les compromis avec le réel (jusqu’à ce mariage blanc avec une chinoise). Il y a du Feydeau dans ce troisième épisode. A la manière d’un plat chinois, il y a de la douceur, de l’amertume et pas mal d’épices. Un sucré-salé succulent pour ceux qui adorent cette légèreté et ce regard assez juste sur notre époque. D’autres trouveront sans doute qu’il y a trop de clichés. Mais la comédie n’est qu’une succession de clichés. Klapisch ne veut pas raconter sa vie (il l’a fait dans Le Péril jeune) mais celle de son public plus jeune, de ses enfants, avec leur esprit, leurs aspirations.

Casse-tête Chinois procure une grande sensation de liberté. Loin d’être dramatique, il vante des personnages progressistes, dynamiques, actifs, positifs. Laissons-nous transporter encore le temps d’un film-sitcom, avec de nouvelles péripéties : c’est vif, drôle, on y pardonne facilement ses points faibles (les personnages secondaires), on se réjouit tout aussi facilement de sa générosité. Quelques scènes sont truculentes. La mise en scène rythmée. Le film effervescent. Mais on s’interroge : c’est bien la jeunesse de ce quatuor désaccordé qui insuffle cette vitalité aux films. Pas sûr qu’en vieillissant ses personnages vers la cinquantaine, Klapisch parvienne au même résultat, à moins de reproduire Le déclin de l’Empire Américain et de sa suite, Les Invasions barbares.
 
antoine

 
 
 
 

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