Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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States of Grace (Short Term 12)


USA / 2013

23.04.2014
 



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"- On m'a dit les règles : pas de ceinture, pas de rasoir. Pas de putain de liberté.
- Pas de jurons.
- Merde, je l'avais oublié, celui-là.
"

C’est un pari. Celui, un peu fou, de parler d’adolescents en grande difficulté sur un ton léger et positif, plein d’énergie et d’espoir. Presque un feel good movie sur la violence, la douleur et l’injustice qui frappent des enfants et des adolescents confrontés aux mauvais traitements ou aux manquements de leurs proches. D’où l’humour, présent dès la scène d’ouverture, mais aussi l’empathie dont fait preuve Destin Cretton face à ses personnages, qui apparaissent en détresse plus qu’en colère, empli de la force de se relever plus que de la tentation de se venger. Le film s’attache ainsi à une poignée de pensionnaires choisis pour leur stature représentative ou archétypale, et dont on suit les pérégrinations (plutôt tragiques, de la maltraitance à la tentative de suicide) sur une courte période de temps. Les autres, les pensionnaires plus secondaires, sont quant à eux réduits au rôle de figurants, presque décoratifs, ce qui est dommage, car on voudrait en savoir plus sur chacun d’entre eux.

Mais le plus frustrant, c’est que ces personnages pourtant passionnants sont uniquement perçus à travers le regard de Grace, la responsable du centre, qui apparaît comme la véritable héroïne de l’histoire. Ce parti pris de concentrer l’intrigue sur elle et sur les deux ou trois adolescents qui font écho à son propre mal-être est assez surprenant, voire maladroit, tant son histoire finit par complètement éclipser celles des autres. C’est d’ailleurs à se demander comment, avec autant de problèmes irrésolus, et en étant aussi centrée sur elle-même, elle parvient réellement à aider des enfants en grande souffrance. Mais le film ne s’attarde pas sur la question, préférant montrer le parcours exemplaire de Grace, qui doit continuer à se battre pour se reconstruire, même de nombreuses années après les faits dont elle a été victime.

Ainsi, States of Grace mêle chronique anecdotique et légère avec des temps forts qui rappellent les traumatismes subis par les enfants du centre, comme lorsque Marcus, un adolescent sur le point de partir, met dans un texte de rap toute la détresse qu’il éprouve face à sa mère junkie. Devant cette séquence, difficile de ne pas être bouleversé, même si l'on a le sentiment que c’est justement ce que recherche le réalisateur, qui se laisse aller à quelques effets mélodramatiques et à des rebondissements plutôt convenus.

Puis, comme pour contrebalancer ces effets trop voyants, il fait ensuite marche arrière dans la toute dernière partie du film, où il ménage avec angélisme un happy end plutôt candide. C’est forcément un peu trop positif pour être vrai, un peu trop "film à thèse didactique pour changer le regard misérabiliste du spectateur sur les enfants maltraités", et en même temps cela rompt avec l’imagerie traditionnelle de ce genre de sujets. En s’éloignant de toute posture trop documentaire, le film devient une sorte de conte lucide mais joyeux sur une réalité plus complexe qu’elle n’est généralement représentée. Dans States of Grace, les enfants victimes rient et se chamaillent, jouent et espèrent, parce que la vie continue, tout simplement. Basique, peut-être, mais rigoureusement authentique.
 
MpM

 
 
 
 

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