Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Last Days of Summer (Labor Day)


USA / 2013

30.04.2014
 



LA VIE D’ADÈLE





«- Je ferai 20 ans de prison pour rester trois jours avec toi. »

Last Days of Summer (Labor Day en VO) semble marquer une rupture dans la filmographie de Jason Reitman. Certes, ses chroniques, sous leurs apparentes ironie ou parfois enrobées de satires, avaient toujours un fond dramatique : les êtres étaient piégés par des circonstances, un schéma de vie, en proie aux doutes face à des situations devenues impossibles à vivre « normalement ». C’est encore le cas ici.

Mais Reitman, ici, ne s’embarrasse plus de dérision ou de second degré. Ces deniers jours de l’été ont un étonnant aspect crépusculaire et mélodramatique. Nous voici plongés 27 ans en arrière, dans ses années 80 où les disques étaient encore en vinyls, les voitures de gros breaks rectangulaires, le téléphone pas encore cellulaire. La préhistoire. Une mère, dépressive, et son fils, qui semble prendre les choses en mains, même s’il rêve d’avoir une adolescence comme les autres, coexistent à l’écart du monde. Et puis une rencontre aussi fortuite qu’inopportune va bousculer leur routine : un évadé de prison qui va les prendre en otage, chez eux. Le fameux Syndrome de Stockholm fera le reste. Un long week-end où une famille va se composer sous nos yeux.

La mère va ainsi changer « d’attaches ». Prisonnière de son passé, au point d’être presque folle, elle se mue en proie de son geôlier. Femme dépendante de son fils, elle devient toute aussi docile avec son kidnappeur. Sans rechigner. Mais « la faim de contact humain, le désir » va être le plus fort. Elle bascule rapidement dans une passion, qui peut la perdre.

Reitman évacue vite la tension éventuelle qu’on pouvait attendre d’une telle liaison dangereuse. La cuisine adoucit les mœurs. La musique également. Et le manque maladif d’un homme (dans le lit pour la mère, dans la maison pour le fils) fait le reste. D’autant que le mâle est bon, malgré ses antécédents. Il n’y a aucun sentimentalisme. Mais le réalisateur plombe un peu son film avec un rythme lent. Le week-end s’étire, langoureusement, sans événements particuliers. Ponctué par quelques flash-backs suggérant le passé du criminel, le film essaie de trouver un tempo, de créer une inquiétude. Mais le spectateur n’est face qu’à une jolie chronique, portée par une femme amoureuse de l’amour et anéantie par les chagrins. Winslet semble habitée par son personnage. Il faut attendre l’arrivée d’une jeune « Chucky » pessimiste, clairvoyante et égoïste pour provoquer quelques palpitations. Cette jeune fille trop mature pour son âge amène une série de répliques rappelant les précédents films de Reitman, comme si elle arrivait pour exprimer le point de vue du cinéaste, avec un certain recul. Malgré l’élégance de la mise en scène et de nombreux instants de grâce, Labor Day continue d’osciller lentement entre plusieurs états, cherchant sa voie. Il faut attendre 75 minutes pour que le film s’emballe et quitte ce tâtonnement qui, finalement, épouse l’apprivoisement des protagonistes. Une fois que le couple est formé, que le fils accepte cette situation, le trio décide de changer son destin. De croire à l’amour, la liberté. D’oublier les traumas du passé. Chacun y voit une manière de réparer ses erreurs. C’est ce que le réalisateur maîtrise le mieux : ce changement de vie, une fois qu’il est affirmé. Alors Reitman accélère : la musique change, les scènes se raccourcissent, les événements se multiplient. Les dilemmes sont évacués au profit d’un objectif : réussir une grande évasion, malgré la police qui rode, malgré la copine qui sait, malgré la voisine qui devine. Tout déraille en un rien de temps. Le film devient plus nerveux, malgré un découpage assez appuyé. Ce classicisme et un excellent travail sur le son suffisent à traduire l’affolement, la terreur, l’apaisement.

Labor Day s’achève ainsi sur un crescendo plutôt que sur un banal happy end, où le sauveur n’est pas celui qu’on croit et le salaud un gentleman profondément sympathique. Ce final subtil, au point de presque regretter le happy end hollywoodien, un comble !, compense les variations floues du film. Reitman a eu toutes les difficultés à rendre intéressante et psychologiquement précise la relation des deux adultes.

Trois fois hélas. Ce n’était pas l’épilogue. Et comme s’il n’était pas certain que sa fin nous plaise, alors qu’elle est assurément la force qui tient toute l’œuvre, il ajoute quelques séquences, avec Tobey Maguire en guest-star inutile. On reste assez perplexe face à ce bonus positiviste, pas loin d’un roman de gare. Mais après tout, c’est la vie d’Adèle, pas la nôtre.
 
vincy

 
 
 
 

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