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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Man of Tai Chi
USA / 2013
30.04.2014
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AMÈRE BASTON
"Le tai chi ne se vend pas"
Keanu Reeves était l'élu de la trilogie Matrix pour laquelle il s'est cassé le cou à pratiquer le kung-fu et les cascades, suspendu à des câbles. Si depuis il n'a pas retrouvé d'autre rôle aussi iconique au cinéma, il a décidé de tenter l'expérience (intense elle-aussi) de réalisateur avec Man of Tai Chi. C'est ce qu'on appelle un film de baston, ni plus ni moins. Toujours amateur d'arts-martiaux, il a réuni le duo chinois avec qui il avait travaillé sur Matrix : son entraîneur Tiger Hu Chen qui a donc le rôle principal et le chorégraphe de combat Yuen Woo-Ping. Si Man of Tai Chi ne révolutionne en rien le genre, il restera comme un divertissement pour les amateurs.
Un gentil coursier chinois (Tiger Chen) apprend à combattre avec les règles du Tai Chi dans un vénérable temple vieux de 600 ans, et il se fait remarquer lors d'un tournoi d'arts-martiaux à la télévision. Un méchant américain (Keanu Reeves) le recrute avec une forte somme d'argent pour des combats clandestins sans règles dont il commercialise la diffusion sur internet. Tiger Chen accepte ces différents duels pour l'argent qui pourra servir à la sauvegarde du vieux temple (sa motivation est bien entendu gentille), mais il va s'agir de combats à mort où chacun peut perdre la vie (le méchant riche est bien évidemment immoral)... L'histoire est simpliste car la trame du film est basique : il s'agit de faire se suivre plus d'une quinzaine de séquences de combats entre le héros et ses différents adversaires.
Man of Tai Chi semble formaté pour l'international, mais il a tout de même été tourné en Chine, et si la pratique du Tai Chi est détournée pour des scènes d'action spectaculaires, le film met tout de même l'accent sur le caractère traditionnel de cette discipline. Les néophytes y apprendront que le chi est une énergie qu'il faut apprendre à contrôler, et surtout que « le tai chi, ce n'est pas un sport de combat par tradition, c'est plus une gymnastique corporelle ». Comme dans les classiques films de kung-fu, on trouve une relation maître/disciple pour l'apprentissage de l'esprit des mouvements. Le héros Tiger Chen sera faible face à un dilemme moral ("le tai chi ne se vend pas") et fort dans sa transgression ("vous vous battez : vous êtes payés"). Voilà pour les quelques scènes de transition (avec aussi une intrigue policière artificielle) présentes pour agrémenter la multitude de séquences de combats qui font l'essentiel du film.
Il est très difficile de réussir un film d'action presque exclusivement basé sur des combats, cela demande une certaine dynamique visuelle : par exemple une originalité des décors (Ong Bak), une brutalité de la violence (The Raid), une virtuosité à filmer ces combats ( 13 Assassins de Takashi Miike avec sa bataille durant presque une heure). Autant d'ingrédients qui font cruellement défaut à Man of Tai Chi qui propose peu de décors (surtout une pièce carrée), peu de violence (ça semble beaucoup trop chorégraphié), et peu de virtuosité pour l'ensemble. La caméra virevolte autour des combattants pour éviter un montage sur-découpé et ainsi mieux rendre compte de l'agilité de chacun, mais bien qu'ils soient tous différents, chaque duel se ressemble trop. On n'échappe pas à un effet de répétition qui s'installe d'autant plus qu'il n'y a guère de véritable enjeu ni de suspens. De plus, le combat final qui aurait dû être le climax est celui qui apparaît comme le moins réussi.
Dans le film, Keanu Reeves se donne un mauvais rôle où il n'est guère convaincant (elles sont loin les années 90 de Point Break et de Speed). Le trio Keanu Reeves + Yuen Woo-Ping + Tiger Chen parvient certes à élever Man of Tai Chi un cran au-dessus d'un banal film de baston oubliable, mais sans le brio qui aurait pu le rendre mémorable.
Kristofy
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