Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Les Soeurs Quispe (Las Ninas Quispe)


/ 2013

04.06.2014
 



CHILI CON QUESO





 « Il n'y a pas âme qui vive dans le coin »

Dans les grands espaces vierges de l'Altiplano andin, trois sœurs chiliennes mènent une existence misérable et solitaire, à mille lieues du bouleversement politique qui agite le pays. Nous sommes en 1974. Le régime militaire de Pinochet se met en place, et avec lui la loi « anti-érosion » qui, en interdisant les troupeaux de brouter, vise à éradiquer les peuples nomades en marge de la société afin de mieux les contrôler. Mais dans ce premier long-métrage, il n'est pas question d'histoire avec un grand H. Justa, Lucia et Luciana Quispe élèvent leurs chèvres, fabriquent du fromage et de la laine, en toute autarcie. Le spectateur entre in media res dans leur quotidien, qui semble aussi ancestral que sans but. Une vie de labeur, oui, mais à quoi bon « s'il n'y a personne pour acheter le fromage » ?

Cette question, presque existentielle, Lucia se la pose sans arrêt, comme pour donner un sens à leurs actes. Quant à Luciana, la plus jeune, elle veut qu'on lui raconte des histoires, pour combler le vide. Ce à quoi Justa, la plus âgée, répond : « Arrête de te comporter comme une gamine ». Car tout ce qui est de l'ordre du rêve, des possibles, n'a pas lieu d'être dans cette désolation, celle du paysage mais aussi celle de la vie (Les hommes sont fourbes, et violent les petites filles). Entre résignation et idéalisme, les sœurs Quispe évoluent en faisant du sur place, laissant la peur de l'inconnu les envahir. Elles vivent au rythme de la nature, s'assèchent au contact de la poussière et du vent permanent, au point que leurs visages rugueux et impassibles semblent taillés dans la pierre des « rucas », grottes qui leur servent d'abris dans la montagne. Elles ne font qu'un avec leur environnement.

Le réalisateur Sebastian Sepulveda s'est emparé de ce fait-divers qui a marqué l'imaginaire des Chiliens pour montrer une autre facette de la dictature. Le spectateur assiste à la fin d'un monde, celui des bergers et d'un mode de vie ancestral. Tout au long du film, une peur sans nom habite les sœurs Quispe. Un danger sans forme les guette et les terrorise. L'absence de dialogue – et donc d'explication – ne fait qu'accroître l'angoisse. L'absence de tension ne fait qu'accentuer le sentiment d'oppression. Si bien que le dernier acte – aussi radical et brutal que le film est lent et impavide – paraît étrange, presque impie. Ces femmes qui menaient une existence si difficile, ont préféré sous la menace mourir comme elles ont vécu : seules et contre tous.
 
Emeline

 
 
 
 

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