Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Transformers : L'âge de l'extinction (Transformers: Age of Extinction)


USA / 2014

16.07.2014
 



LE BAY DES COCHONS





« - Tessa, attrape mon manche.
- Quoi ?
- Elle a des doigts de fée.
»

On pouvait s’attendre à un changement avec ce quatrième épisode de Transformers. Dès le début, on veut nous vendre cette mutation : « Je crois que l’Histoire va changer ». Après tout, en prenant Mark Wahlberg pour sauver le monde, on s’imaginait que les producteurs allaient nous réserver quelques surprises. Hélas ( ?), cette nouvelle aventure des robots Hasbro est au même niveau que les précédentes. Outre la déshumanisation persistante qui constitue la moelle de l’histoire, celui là rend le cerveau tout aussi disponible que les trois autres films. Il ne s’agit pas de divertir ou de ressentir : Transformers est là pour nous vider le cerveau, déconnecter nos neurones, écraser nos synapses.

Collage numérique

On s’étonnera toujours de constater que Michael Bay filme comme un cochon. Des cadrages contraints par les effets spéciaux, un montage découpé à la hache avec des inserts inutiles, des plans qui se multiplient pour rythmer une action ou qui insistent sur un détail de peur qu’on ne comprenne pas le message, une image esthétisant à l’extrême le moindre coucher de soleil ou la maison du héros (avec guirlandes de lumières dans l’arbre le soir pour faire « romantique »), et plus généralement un énorme manque d’inspiration. Les méchants en gros 4x4 noirs qui envahissent les bleds du Texas, ça fait quand même très eighties. Le cinéaste enchaîne les clichés jusque dans les décors (une vision du Texas rural digne d’un film des années 60).
Même en migrant à Hong Kong, au milieu des cités populaires de la métropole asiatique, Bay n’a pas le courage de plagier les Johnnie To, Tsui Hark et autres Andrew Lau en y insufflant une sorte de nervosité qui manque cruellement à son film.

L’aspect lourdaud n’est pas arrangé par ces monstres technologiques qui finalement se bougent assez péniblement quand ils ne sont pas transformés en véhicules motorisés terriens. Là encore, le réalisateur ne trouve jamais le bon rythme. Le découpage est simpliste : une l’action (déjà vue) et le mélo (sans aucune émotion) s’alternent comme des codages informatiques. 1.0.1.0 etc…

Niveau primaire

A cet exercice pataud derrière la caméra s’ajoute un scénario insipide. Comment peut-on croire qu’un ingénieur-ferrailleur (comprendre intellectuel-manuel), certes bien musclé mais très loser, se mue en héros à la Die Hard en quelques jours ? Comment peut-on se contenter d’une banale histoire père/fille très convenue (avec le père hyperprotecteur et ultra conservateur) – avec un petit ami intrusif pas forcément bienvenu - pour assouvir un besoin d’identification avec le spectateur ? Comment nous balader avec tant d’incohérences et de pistes amorcées (on ne saura jamais les conséquences de la découverte lors du prologue d’un dinosaure en Arctique) sans s’interroger sur la dramatisation d’une histoire qui en manque cruellement ?

Transformers : l’âge de l’extinction avait éventuellement du potentiel : l’extinction des dinosaures, de l’espèce humaine, des gentils robots… cela ouvrait de multiples voies pour nous emmener dans un délire apocalyptique. Il n’en sera rien. On en revient encore aux vieux classiques : l’Américain moyen est seul capable de sauver le Monde, et même la Chine, contre un complot gouvernemental et une menace extra-terrestre (rien que ça). La stylisation de l’exercice n’apportera rien. On en vient en effet à avoir un temps de cerveau si disponible que nous commençons rapidement à pointer les invraisemblances et erreurs du script.
Et il y en a une ribambelle. A force de chercher la belle image on ne sait plus quelle heure il est, ou alors les journées ne font que douze heures dans le monde des Transformers. Chicago nous est montrée en reconstruction au début du film (suite logique de la fin du troisième épisode). Quelques jours plus tard, la métropole semble revenue à son état d’origine (avant la destruction par la guerre des robots), sans aucun gratte-ciel en (re)construction. Idem à Hong Kong, bien amochée par la guerre des mondes, qui réapparaitra nickel pour l’épilogue. KSI est censé être un laboratoire ultra-secret et ultra-protégé : on y entre comme dans un moulin. Allons-y pour un autre foutage de gueule : on entre (calmement) dans un magnifique bâtiment contemporain au milieu des eaux à Guangzhou (Canton en vf), on ressort (en fuyant) d’un hangar industriel de banlieue.

Jeux d'enfants

Les personnages stéréotypés n’arrangeront rien : le baba cool (Rhys Ifans aurait été parfait pour le rôle) n’a aucune espérance de vie puisqu’il a trahi (tout ça est très moral). Le petit ami est d’une fadeur à faire passer le casting de Fast and Furious pour des acteurs de l’Actor’s studio. L’assistante chinoise est là pour attirer les chinois dans les salles de cinéma en Chine. Etc… Au final, il ne peut rester que ceux qui font preuve de bravoure, qui ont un honneur ou qui ne sont pas corrompus. Mais chacun a un égo surdimensionné et de la testostérone en surdose. Il n’y a bien que ce mégalo de Stanley Tucci qui surnage avec un personnage ambivalent, même s’il a l’air de se foutre royalement du film.

Apôtre de la destruction, Michael Bay casse ses châteaux de sable à coups de pieds (de robots), pille un peu partout ses séquences d’action (Star Wars dans Chicago, transformée en étoile noire, Pacific Rim, Independence Day, …) et son pitch (Frankenstein : quand la création dépasse le maître). Deux heures quarante cinq de bruits sans fureur, avec surenchère nécessaire pour le final. Scènes de destructions massives qui font bailler tant on en a déjà été gavé.

Pourtant le film semble être lucide. Dans un cinéma désaffecté au Texas, le vieux propriétaire annonce la couleur : « Les films d’aujourd’hui. Que des remakes et des suites à la con ». Vers la fin de film, on entend : « certaines choses ne devraient jamais être inventées ». On se dit que Michael Bay a conscience de faire du produit industriel qui nuit à la santé mentale du spectateur. Mais contrairement à Stanely Tucci dans le film, rien ne dit qu’il n’en produira pas d’autre, qu’il ne se remettra pas en question, au point d’arrêter de jouer au grand créateur. Après tout, c’est risible, pour ne pas dire ridicule. Et il nous le rappelle : « Ça c’est du commandement. Ou du lavage de cerveau. » Mais non « ça, c’est Optimus Prime ». Défense de rire. C’est tragique.
 
vincy

 
 
 
 

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