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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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The Raid 2: Berandal
Indonésie/USA / 2014
23.07.2014
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SUITE ROYALE
Après un premier épisode rentre-dedans tout en rage « claustro » assez épatant dans sa proposition filmique, voici que sort le deuxième opus de The Raid, toujours réalisé par le Britannique Gareth Evans. The Raid 2, donc, est une suite directe qui ose s’affranchir des limites du monde vidéoludique en pallier du film original, afin d’y exporter son concept ramassé sur les chemins sinueux du grand polar mafieux. L’espace prend une autre dimension via une géographie repensée pour l’occasion. Pour le reste, rien ne change ou presque. Nous avons, devant nous, un métrage limpide d’efficacité convoquant un art de la chorégraphie sans cesse magnifié à même d’exposer les contours d’un univers encastré entre l’opératique de cinéma et le réalisme saisissant des coups portés.
Peu importe, alors, que le film dure 2h30 ou qu’il essaie de développer – bien mal au demeurant – une histoire d’infiltration dans le milieu de la pègre Indonésienne. Car l’intérêt, le vrai, n’est pas là. Il se trouve, sans surprise, dans ces interstices de combats, le plus souvent au corps à corps, véritable raison d’être d’un film qui accouche d’une danse sanglante sans préavis, ni baisse de régime. Et Gareth Evans fait fort, investissant à merveille l’espace des différents lieux qui vont lui servir à exprimer ses intentions.
Le cœur de l’histoire, comme sa légitimité, bascule bien vite autour des règlements de compte pour faire se conjuguer sans complexe polar et art martial. Ce rapprochement conduit le cinéaste à repenser dans l’âpreté d’une vérité « organique » les scènes de « baston ». Nous sommes loin d’un Ang Lee (Tigre et Dragon) ou d’un Tsui Hark. Ici, tout se joue au sol et sans flingues, ou si peu. En somme, tout est affaire de pieds et de poings, accompagnés, ça et là, par quelques armes contendantes. L’impact physique n’y est que plus vrai. Plus beau, aussi, d’une certaine manière…
C’est par cette optique intéressante que le réalisateur compose une petite musique favorisant le remodelage du concept d’origine, en créant une chorégraphie d’ensemble capable d’animer des corps condamnés à répondre, toujours, par le combat. Peu importe la situation dans laquelle les uns et les autres se trouvent. Leur salut ne peut échapper à la logique d’affrontement. Ainsi, les interstices deviennent des trous béants dans lesquels la raison d’être du film s’engouffre. Et le spectateur avec. Prendre le film autrement ne servirait à rien, puisqu’il n’y a rien au-delà de cette métaphysique des corps imbriqués sans cesse en mouvement. Les scènes de « parlottes », tampons figés dans des lieux inertes, ne servent qu’à préparer l’explosion du cadre dans l’avancement d’un itinéraire calibré dès le départ.
Ceci nous amène à parler de la mise en scène. Celle-ci se doit de sublimer les corps, d’appréhender les volumes, de spécifier chaque espace investi. La montée en puissance n’en sera que plus belle. Jusqu’à l’affrontement ultime, apothéose gore d’une mission qui ne laisse aucune échappatoire. Le propos paraît simpliste. Effectivement, il l’est. Mais, faut-il encore avoir l’œil pour mettre en images ce plaisir enfantin, car primaire, d’un héros mutique suffisamment doué pour mettre à mal avec la seule force de ses poings une organisation mafieuse.
Sur ce point Gareth Evans fait preuve d’inventivité dans la succession de scènes d’action. Elles rythment la narration, ont la bonne idée de n’être pas répétitives et emploient, toujours à bon escient, le plan-séquence pour nous offrir, au final, une montée crescendo des plus jouissives. De la baston sale et confinée dans un « chiotte » d’une prison à celle, beaucoup plus ouverte et lumineuse, d’une cuisine à la blancheur immaculée, c’est un sans-faute sur toute la ligne. Un sans-faute, oui, mais uniquement dans la redéfinition de ce que doit être au cinéma, c’est-à-dire dans un film de fiction, la puissance brute d’une violence jamais gratuite qui, malgré son côté fun, sonne terriblement vraie.
geoffroy
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