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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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La Planète des singes : l'affrontement (Dawn of the Planet of the Apes)
USA / 2014
30 juillet 2014
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AVÉ CÉSAR
« - Il faut montrer notre force.
- Nous la montrerons. »
« Sequel » du « prequel » pour « rebooter » La Planète des singes, cet Affrontement n’a évidemment rien à voir avec le roman du français Pierre Boulle. Hormis l’idée que des Singes conquièrent la Terre, ce nouvel opus est un fantasme purement Hollywoodien, aidé (grandement) par l’évolution des effets numériques et laissé à son simple objectif de divertissement.
Côté primates, le scénario shakespearien (César et son Brutus, avec Néron en prime, vont se disputer la manière de diriger le monde), la crédibilité ultra-réaliste des singes, et l’intégralité des bonnes scènes (d’humour comme d’action), il n’y a rien à craindre : ils dominent sans partage le film. Même « psychologiquement » ce sont les personnages les mieux écrits, provoquant les situations les plus « complexes ».
Côté humains, l’absence d’une intrigue originale (voire un calque plagiaire de ce que nous avons déjà vu dans les Jurassic Park), le manque d’épaisseur des comédiens, et la multiplication des stéréotypes (on peut deviner par avance quel « asshole » va mourir ou quel « good guy » va s’en sortir) nous conduit à n’avoir aucune empathie pour l’espèce : ils nous désintéressent.
Nous voici donc 10 ans après la fin du précédent film, et il ne reste plus beaucoup d’Hommes sur une planète ravagée par une pandémie mondiale. La nature a envahit toute traces de civilisations, reprenant ses droits. Dès lors que les Singes vont croiser des humains, l’affrontement sera inévitable (et urbain). Pourtant le titre français (l’affrontement) comme le titre anglais (l’aube) soulignent la seule partie captivante du film : le face à face entre deux singes, deux visions « politiques », deux méthodes (coexistence distante et pacifique avec l’Homme ou extinction de l’espèce rivale et causeuse de tous les maux). C’est un affrontement entre deux rivaux comme il s’agit de l’éveil d’une planète où le singe est roi.
Toutes ces guerres assurent le spectacle. Même si les séquences n’ont rien de singulières, le montage et le rythme sont suffisamment maîtrisés pour nous distraire pleinement.
Il est regrettable, contrairement au précédent film, que les scénaristes n’aient pas été plus ambitieux pour les humains. Chaque acteur est un cliché en soi, assez fade qui plus est. La faiblesse des hommes confrontées à la force des singes (dans le scénario comme dans l’histoire) ne permet pas de surprendre le spectateur, malin comme un singe et toujours prêt à prévoir la fin avant qu’elle ne se déroule.
Sans l’insurrection, les trahisons et finalement la dramatisation dans le clan de César (une fois de plus incroyable créature virtuelle incarnée par le formidable Andy Serkis), le film souffrirait d’hypertrophie (maladie qui atteint les blockbusters jouant la surenchère visuelle plutôt que l’intensité du scénario). Sans les expressions simiesques subtiles et épatantes pour compenser l’absence de jeu des Homo Sapiens, on assisterait à un vague remake de la franchise La Planète des singes des années 70, où la SF stylisée du premier film devenait de plus en plus péplum.
Ici le gros barnum s’avance en prenant le temps, malgré tout, de nous raconter une histoire (contrairement à Transformers par exemple). Avec un air de Western où les Indiens attaquent le fort assiégé puis de film catastrophe (La tour infernale), le spectacle se déploie généreusement (avec en summum une courte scène où une caméra nous offre une vision du champ de bataille à 360° en se fixant à une tourelle de tank en folie). Il faut bien toute cette phase de destruction et de conflit pour nous nous embarquer. Le paradoxe est que nous sommes plus inquiets pour César que pour la petite communauté humaine de San Francisco. Mais on comprend vite alors que la Fox a transformé cette nouvelle saga en franchise héroïque. Que de similitudes avec les X-Men (qui eux aussi ont eut le droit à un « affrontement » final à San Francisco) où les singes remplacent les mutants, où César joue les Professeur X et Koba les Magneto. Ces singes intelligents grâce aux expériences génétiques de l’homme mériteraient cependant une histoire plus originale et moins convenue pour que le miroir qu’ils nous tendent nous fasse réfléchir sur la condition humaine. C’était la force de la première adaptation, qui avait su se détacher du roman de Pierre Boulle pour l’ancrer dans son époque, quitte à être démodé visuellement et formellement. C’est la faiblesse de ce film qui préfère être « à la mode » sans trop se soucier du sens.
vincy
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