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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Des lendemains qui chantent
France / 2014
20.08.2014
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AU DÉPART, AU DÉPART, UN HOMME UNE ROSE À LA MAIN
Dans l’isoloir d’un bureau de vote un homme hésite entre choisir le bulletin marqué du nom de Lionel Jospin ou un autre, c’est le 21 avril 2002. Un flashback le ramène juste avant le 10 mai 1981, c’est le jour où la télévision affiche le portrait du nouveau président élu et son nom François Mitterrand. Qu’est ce qui s’est passé à la fois pour ce personnage et ses amis entre la fête du premier président socialiste élu au suffrage universel et 21 ans plus tard quand le candidat socialiste est éliminé pour le second tour d’une présidentielle ?
Cette dizaine de minutes d’introduction lance le film Des lendemains qui chantent sur des rails, mais malheureusement des changements d’aiguillage font que ce début restera comme la meilleure séquence du tout le film… On y voit en accéléré et en quelques pauses différentes allusions à divers moments plus ou moins (in)signifiants des années 80 et 90 qui défilent. En suivant deux frères, la femme qu’ils aiment, et en périphérie leur père et leur meilleur ami, le film évoque davantage la montée du minitel rose et celle de Bernard Tapie, la télévision animée par Collaro et Ardisson, la cohabitation Chirac et Jospin, la coupe du monde de foot 98, que son véritable sujet: le déclin des idéaux de gauche à l’épreuve des années qui passent.
Léon tombe amoureux d’une Noémie qu’il voit pendant seulement trois jours, plus tard il va la retrouver à Paris, fiancée à son frère Olivier: le scénario démarre sur une intrigue de triangle amoureux qui sera vite expédiée ensuite. Dès lors sans romance ni humour, ce sont des séquences anecdotiques qui se suivent, vides d'enjeu ou d'émotion. On les découvre sans déplaisir mais sans grand intérêt non plus. Pour faire transition, on ajoute le personnage d'un père finalement inutile qui se confie à un religieux. Le tout est tout de même agrémenté de quelles images documentaires de l’époque pour vouloir rendre cette fiction de bric et de broc un peu plus authentique. On sent l'ombre de Klapisch, sans en retrouver l'éclairage sociologique.
Entre 1981 et 2002 la société française a connu de multiples évolutions dans le domaine des médias, des technologies, du travail, de la politique en général et du débats d’idées en particulier. Retracer avec une poignée de personnages cette vingtaine d’années riches en évènements dans un film de 1h30 relève du pari qui ne peut être réussi que si le scénario offre un point de vue original. Ici Des lendemains qui chantent enfile les clichés comme des perles sous forme d’un best-of assez convenu. A l’image de la brochette d’acteurs Pio Marmaï, Gaspard Proust, Laetitia Casta, Ramzy Bedia, André Dussolier qui peinent eux aussi à incarner leurs personnages, malgré les changements de coiffures et de vêtements. La seule originalité de l’histoire est la tentative d’aborder le renoncement à un idéal politique pour agir en faveur d’une stratégie de séduction.
Dans ce film Pio Marmaï est un journaliste qui voudrait critiquer le système politique, son frère Gaspard Proust est publicitaire pour de la communication politique, et Laetitia Casta sera conseillère politique du président : le scénario de ce trio trop proche de la sphère du pouvoir n’arrivera guerre à nous faire partager les véritables changements vécu par le peuple entre 1981 et 2002. Pour cela il faudra plutôt (re)voir deux films qui eux ont pris l’amplitude nécessaire d'environ 3h de récit pour mieux dépeindre avec plus de curiosité, de justesse et d’originalité ces chamboulements d’idéal contrarié : Nés en 68 de Olivier Ducastel et Jacques Martineau (au cinéma) et Rien dans les poches de Marion Vernoux (à la télévision et en dvd)...
Le réalisateur Nicolas Castro semble hésiter entre ce qui relève d’une certaine nostalgie ou ce qui tient de l’anecdotique, et au final son film semble même se retourner contre son projet initial puisque en l’état le propos devrait plutôt avoir pour titre ‘des lendemains qui déchantent’. Toutefois le hasard fait que avant la sortie de ce film en salles de cinéma les évènements politiques récents (baisse de popularité du président socialiste au pouvoir, score de l’extrême droite à une élection européenne) font comme un écho à cette histoire racontée qui se termine en 2002 à l’écran. De cette fameuse Génération Mitterrand qui représente ceux qui à l’âge de 20 ans n’avaient connu dans leur vie durant 14 ans qu’un seul président on ne saura finalement pas grand-chose qui pourra la faire mieux connaître à la génération qui a 20 aujourd’hui.
Kristofy
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