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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Lou! Journal infime
France / 2014
08.10.2014
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QUAND IL Y A LOU TOUT DEVIENT FLOU
«- T’es toute seule ? parce que je peux repasser …
- Non mais ma mère est planquée derrière le frigo. »
Si la BD Lou a un charme certain, un humour plaisant et un regard impertinent sur la société, le film ne réussit jamais à traduire l’une de ces trois qualités. En transposant lui-même sa bande dessinée, Julien Neel ne s’est pas rendu service. Il a voulu faire une comédie décalée, on s’y amuse à peine. Il a voulu rester fidèle à l’esprit des personnages, on est rapidement assommé par cette voix off omniprésente. Tous ces éléments construisent une distance entre le spectateur et le film, qui ne sent jamais réellement impliqué dans cette relation mère/fille.
La faute est double. D’une part, le récit ne porte aucun enjeu, aucune dramatisation. La fantaisie (factice) ne suffit pas à nous divertir. Cette chronique familiale ne souffre d’aucun trauma. Et les vagues névroses des uns et des autres font juste sourire.
D’autre part, en misant tout sur l’ambiance, les décors, les costumes et l’ensemble de la direction artistique, le réalisateur enferme sa mise en scène dans un cadre trop stylisé. Les personnages deviennent ainsi des marionnettes dans un théâtre, à l’instar du soap opéra bricolé de Lou et de sa meilleure amie. Rien n’est réellement incarné dans cet univers de bric et de broc. Le film manque de rythme, déroulant sans faits et n’osant jamais le conte de fée déjanté ou la comédie de mœurs bohème.
On sent les influences de Gondry, Chomet et Jeunet. L’audace du dessin animé SF aurait pu nous envoyer dans un autre monde. Le mélange des tonalités est un risque qu'on est prêt à accepté. Mais l’onirisme tombe vite à plat. Les métaphores sont trop appuyées. Le pastiche n’est pas assumé. Et au final, la loose de la mère et de la fille déteint sur le long métrage. C’est dommage : il y avait une bonne idée à creuser avec ces fausses fictions insérées dans le récit (théâtre d’enfant, vidéo amateur, voyeurisme, dessin animé, histoires réinventées). Toute cette irréalité qui sert à survivre dans une dure réalité, cette folie enfouie qui ne demande qu’à ressurgir tombent à l’eau.
Même l’arrivée de Nathalie Baye ne suffit pas à faire prendre la sauce. On se consolera avec un propos résolument féministe, où les mecs paniquent et niquent peu. C’est gentillet et immature. Bref, ce journal intime manque de férocité et de romanesque.
EN
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