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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Les souvenirs
France / 2014
14.01.2015
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NOS SÉPARATIONS
«- J’écris pas de roman.
- Tu devrais. Avec la tête que t’as, tu devrais. »
Deuxième livre de David Foenkinos adapté sur grand écran, Les souvenirs est un récit intergénérationnel sur le temps : celui qu’un fils a devant lui, celui que des parents subissent, celui d’une grand-mère qui est compté. En résumé, « ça passe vite la vie quand même ». Le film débute ainsi comme il se finira : avec un enterrement. Les souvenirs c’est aussi ce qu’on emporte dans la tombe. Ce genre d’histoire peut être vite plombée par une overdose de sentimentalisme.
Ici Jean-Paul Rouve réussit le périlleux équilibre entre les sentiments et la dérision. L’humour, parfois un peu noir, allège le film et illumine des personnages plutôt banals (mais drôles) dans leur vie étriquée. Car la vie ressemble à un mouroir. Chacun creuse sa tombe, et il faudra tout un élan (et un étrange caissier sur une aire d’autoroute) pour qu’ils se ressaisissent. Que les cloisons qui les séparent (l’âge, les envies, l’avenir, les fameux souvenirs) disparaissent pour les réunir dans la même pièce.
Les souvenirs ne manque pas de tendresse ni de sincérité. Le film est efficace et cocasse, consensuel et bien écrit. Les comédiens sont justes en permanence. L'ensemble donne cette impression agréable de « feel good movie », ponctué de séquences délicieusement absurdes (notamment la visite à l’apprenti-peintre). Les dialogues régalent et le regard de Rouve sur l’homo-occidentalus, entre observations moqueuses et tics de langages, ont l’effet d’un euphorisant.
Il y a un grain de folie derrière toute cette normalité qui est réjouissante. Il contraste avec ce passé qui s’évapore devant nos yeux. Ce temps qui passe et qu’on ne peut plus rattraper. Cette mine déconfite ou dépressive qui nous marque le visage alors qu’on aime la vie. « Quand le présent n’avance plus, il faut remettre de l’essence dans le passé. » L’essence c’est une affaire de sens. Celui qu’il fait donner à son existence.
Et justement, en affirmant leur refus de subir les décisions des autres, en provoquant un à un le déclic qui va les obliger à changer, les personnages donnent une belle dimension au propos existentialiste (mais léger) du film. Ce qui conduira le spectateur à verser sa petite larme vers la fin. Il faut dire qu’Annie Cordy est formidable en grand-mère franche et pas dupe. Car, et ce n’est pas le moindre exploit, en donnant un ADN commun et cinématographique à Annie Cordy, Michel Blanc, Chantal Lauby et Mathieu Spinosi (violoniste avant d'être acteur), auxquels on peut ajouter Audrey Lamy et Jean-Paul Rouve, le réalisateur réunit l'opérette, le Splendid, les Nuls, les Robins des bois, Scènes de ménages. Chaque génération de la comédie est représentée, ce qui forme un orchestre cohérent pour une partition efficace et touchante. Tous ont le souci du travail bien fait, l'envie de donner le change au public. Et ça en fait un beau souvenir.
vincy
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