Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Félix et Meira


Canada / 2014

04.02.2015
 



TORAH PAS LE CHOIX





«- Je n’ai pas le droit de répondre à un homme dans les yeux.»

La rencontre amoureuse entre un québécois un peu paumé (le sexy Martin Dubreuil) et une juive orthodoxe égarée (la séduisante Hadas Yaron) a tout pour intriguer. Le réalisateur Maxime Giroux pouvait en faire un pamphlet religieux, un brûlot féministe, une comédie romantique. Que nenni. Felix et Meira est un drame mélancolique, presque vaporeux, où l’hiver cotonneux enveloppe froidement les sentiments qui parviennent difficilement à chauffer l’atmosphère.

Elle est une femme à part, mal à l’aise dans une communauté qui empêche d’écouter de la musique, de se vêtir d’un jean, qui la contraint à des rites auxquels elle ne croit plus, destinée à procréer contre son gré. Elle dessine pour s’évader.
Il est un homme ailleurs, sans certitude sur son avenir, en quête d’un déclic qui le mettrait enfin sur les bons rails.
Ils sont tous les deux déracinés. Elle dans un pays étranger. Lui endeuillé par la mort de son père.
Avec une succession de petits détails, on comprend rapidement que les deux personnages sont hors de leurs mondes, mal à l’aise dans leur famille. Là où il y a des gènes, il n’y a pas de plaisir. Deux personnages malheureux ça ne fait pas un film heureux.

La première partie est construite symétriquement : elle puis lui, elle et lui, elle puis lui, elle et lui, etc. Ils ne sont pas encore réunis. Trop tristes, trop isolés du monde extérieur, trop prisonniers de leur passé. Ils souffrent, et pourtant le spectateur s’intéresse à ce couple étrange et antagoniste. La perversité à voir ces deux animaux piégés, l’une par son mari, l’autre par ses erreurs, n’y est pas pour rien.

Parce que nous espérons, évidemment, qu’ils vont se libérer de tout ça. On y croit car il l’amène dans la vie tout en se ramenant dans la vie. Les dessins, la musique, le sexe va les réunir. On y croit parce que le cinéaste essaie de conduire son histoire sur d’autres territoires. La liaison adultérine à New York, la loufoquerie quand Félix en vient à se déguiser en juif orthodoxe pour approcher Meira, les interdits qui sont brisés un à un…

De sacrifices en tentations, de peurs en résurrection, on a envie que la musique distordue conduise à une mélodie harmonieuse. Mais la subtilité du récit, qui parfois s’éternise un peu inutilement, nous emmène sur une autre voie. La rencontre entre le mari et l’amant – de loin la plus belle scène du film – change la perspective. Et notre vision du mari avec, certes un peu tardivement. Un autre piège se referme sur les deux amoureux. Aux frontières de la liberté, les voici de nouveaux attachés par un serment invisible et tout aussi pesant.

Ceci explique l’amertume que va nous laisser le film sur la fin. On attendait un élan ou une cassure. Le réalisateur préfère un épilogue grisâtre, aigre et morose. Le bonheur s’est déjà envolé. Ils n’ont pas l’air plus heureux. Et nous avec. On voulait y croire. « Je suis désolée » dit-elle. Nous aussi. Le film n’explique rien, nous laissant libre d’interpréter l’avenir de ce couple, sans vraiment nous rassurer sur leur choix. Felix et Meira n’est pas seulement mélancolique, il est désespéré.
 
vincy

 
 
 
 

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