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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Selma
USA / 2015
11.03.2015
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PRIDE
«Que se passe-t-il lorsqu'un homme se dresse et dit ça suffit?»
Que l'industrie cinématographique ait attendu autant de temps pour faire un film sur le grand Martin Luther King laisse perplexe. Aucun studio ne s'est intéressé jusque là à cet orateur qui a tant fait pour les droits de l'Homme ou sur le mouvement des droits civiques. Que le film ait été boudé aux Oscars (deux nominations et une statuette pour la meilleure chanson), et ce fut un choc... qui réveilla le débat sur la discrimination et le racisme dans l'Amérique d'Obama. Retraçant la longue marche historique que les noirs américains ont connu afin de revendiquer le droit de votes, Selma est bien plus qu'un film historique. C'est autant pédagogique qu'utile, indispensable que bouleversant. C'est aussi le reflet d'une illusion. Le rêve de Luther King a produit de belles réalités, mais qu'elles sont fragiles. Et le cauchemar revient parfois, jamais loin...
La réalisatrice Ava Du Vernay met en avant cette aventure humaine et cruciale tout en mêlant la lutte politique dans les coulisses du pouvoir, la force mentale des manifestants ainsi que le dilemme personnel de Martin Luther King, qui malgré sa confiance, faiblissait dans sa foi de justice.
Si Martin Luther King Jr est la figure centrale du film, la cinéaste a choisi de mettre en avant ceux sans lesquels tout ça ne serait jamais arrivé: les marcheurs. Au cours du printemps 1965, l'Amérique connait une période sombre à travers la forte ségrégation présente dans certains états (les évènements actuels aux États-Unis ne datent pas d'hier). De courageux marcheurs, menés par le pasteur, ont tenté à trois reprises de former un cortège pacifique reliant la ville de Selma à celle de Montgomery. Des centaines de personnes s'étaient associées afin de revendiquer le droit de vote. Et tout cela au péril de leur vie.
Avec cette (dé)marche Ava Du Vernay met en lumière des évènements qui ont fait basculer à tout jamais le pays mais elle insiste aussi sur les ressorts humains qui rendent capables de tels gestes publics. La solidarité et la force à travers laquelle ces protagonistes ont changé l'histoire produit sa dose d'émotion. L'ensemble du casting est impeccable, porté avec ferveur par un David Oyelowo transcendé dans le rôle du Prix Nobel de la paix. L'acteur lui donne une dimension shakespearienne qui permet au film de ne pas être un simple biopic. Il y a quelque chose de pourri dans ce royaume américain, et lui s'interroge s'il faut être ou ne pas être. En Roi des âmes blessées, Oyelowo offre une incarnation subtile et intelligente, sans pourtant vraiment ressembler à son modèle.
Ce film est bien plus qu'un simple film historique et biographique, il est un véritable message de paix, de solidarité et d'espoir. Selma nous donne envie de nous tenir debout face aux inégalités du monde et d'accomplir l'impossible. Pas étonnant que Brad Pitt ait produit coup sur coup 12 Years a Slave et Selma. Les deux films sont deux facettes de l'histoire des afro-américains dans leur combat pour s'affranchir de la tutelle blanche.
Mais bien plus qu'avec le film de Steve McQueen, nous sortons de celui d'Ava Du Vernay déboussolés, les yeux humides, avec la chair de poule et une envie folle de faire le signe du Black Power. Cynthia
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