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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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On est vivants
France / 2015
29.04.2015
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NOS SÉANCES DE LUTTE
« Il faut donc lutter, au moins pour s’épargner la honte de ne pas avoir essayé. Le doute porte sur la possibilité de parvenir à changer le cours du monde, mais non sur la nécessité de le tenter… * »
On est vivants, c’est un tour d’horizon, foisonnant souvent, frustrant parfois, de ce que peut être l’engagement à notre époque, ainsi qu’une réflexion sur sa nature, ses formes et ses buts. Des Zapatistes du Chiapas au mouvements Droit au Logement à Paris, des participants à la guerre de l’eau en Bolivie aux membres du collectif "Quartiers Nords, quartiers forts" à Marseille, la réalisatrice Carmen Castillo est allée à la rencontre de militants du monde entier, qui réinventent au quotidien la physionomie de l’action collective.
Une quête captivante qui, si elle laisse souvent le regret de ne pas passer plus de temps auprès de chacun des protagonistes, dresse un portrait spontané, éclectique et sincère des différentes formes d’engagement contemporain, dont le principal point commun semble être la dimension collective. Les militants rencontrés se reconnaissent ainsi dans des mouvements sociaux, très souvent populaires, qui n’obéissent à aucune organisation politique identifiée. C’est ensemble, dans la force même de leur groupe, qu’ils trouvent la force et le courage de se battre, et non dans des idéologies ou des théories abstraites. Comme une démonstration implacable que l’impuissance face à l’injustice ou la misère n’existe pas plus que la résignation inéluctable, et qu’il suffit de sortir de sa torpeur pour s’apercevoir que l’on n’est pas le seul à se révolter. Un constat qui fait du bien, à une époque de profond découragement face à la multiplication des causes à défendre.
Mais ce qui est probablement la plus belle idée du film, c’est d’avoir rythmé cette recherche incessante des visages de l’engagement avec les propos profonds et brillants d’intelligence de Daniel Bensaïd, dont le film est d’une certaine manière le portrait en creux. Logique, puisque le philosophe engagé qui fut l’un des fondateurs de la Ligue Communiste Révolutionnaire, est indirectement à l’origine d’On est vivants. C’est en effet suite à son décès que Carmen Castillo a eu l’idée et l’envie d’aller poser sa caméra dans les zones de résistance du monde entier. Elle lui rend ainsi un hommage vibrant et sensible, tout en nourrissant son film d’une pensée limpide et indispensable qui met en relief les expériences et les témoignages recueillis par le film.
Malgré un regard parfois amer porté sur le monde, il se dégage d’On est vivants un optimisme lucide qui secoue les consciences. C’est comme si le film livrait un mode d’emploi incroyablement simple mais efficace de l’engagement et du militantisme, mode d’emploi que l’on pourrait résumer par cette formule parfaite de Daniel Bensaïd : "On s’engage, et puis on voit". Le plus bel héritage que l’on pouvait attribuer à ce grand militant devant l’éternel, et la conclusion pleine d’espoir d’un documentaire qui rappelle l’essentiel : ce n'est qu'en agissant que l'on se sent véritablement vivant.
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*Citation de Daniel Bensaïd MpM
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