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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Mémoires de jeunesse (Testament of Youth)
/ 2014
23.09.2015
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REVIENS MOI
"On lui offre un piano alors qu’elle veut une année à Oxford !"
Mémoires de jeunesse c'est l'histoire dramatiquement réelle de la future écrivain Vera Brittain (Alicia Vikander émouvante et irradiante, avec des airs d’Emily Blunt), femme de caractère, féministe, gauchiste, suffragette, pacifiste avant l’heure, et des trois hommes qui gravitent autour d'elle avant que la guerre 14-18 ne les lui arrache. Edward, son frère (Taaron Egerton doux et lumineux), Victor (Colin Morgan, touchant) et Roland (Kit Harington charismatique et transcendant, sans ses bouclettes de feu Jon Snow dans Game of Thrones) se retrouvent autour de Vera le temps d'un paisible été. Le calme avant la tempête.
Vera n’a pas besoin des hommes, ils sont même un obstacle à ses ambitions : "Je le ferai par moi-même!" Mais voilà Roland qui se met en travers de son chemin et les sentiments emportent tout. On l’aura compris, il s’agit d’un mélodrame historique, romantique et finalement tragique. Amour peu consommé, la faute au quand dira-t-on de l'époque, mais aussi à la guerre qui va tout dévaster. Ce cache-cache érotique nous offre les plus belles images du film: des mains qui se frôlent, des lèvres désireuses l'une et l'autre filmées en gros plan, des regards manqués, des caresses songées et toujours cette soif du corps alimentée par une frustration dévorante. Ces interdits transforment une simple sortie au musée en véritable course-poursuite pour semer le chaperon protecteur et gardienne de la morale. Puis c'est la guerre qui éclate, celle de 14-18. Guerre terriblement bien représentée ici. Derrière l’esthétisme, il y a un souci de réalisme précis, une volonté de montrer le carnage provoqué sur les corps et les gueules. L’horreur des camps de secours, des jeunes soldats entassés, mourants ou déjà ailleurs.
Les hommes partent dans les tranchées laissant les femmes livrées à elles-mêmes : certaines étudient, d’autres tricotent et enfin quelques unes s’engagent comme infirmières. Les hommes ne reviendront pas. Les femmes devront faire avec. "Nous vivons tous entourés de fantômes. Nous devons apprendre à vivre avec."
Vera se retrouve seule et en panique à chaque une de journal, chaque télégramme, chaque lettre de Roland et de son frère qu'elle ne reçoit pas à temps (la guerre ou l'ennemie de l'épistolaire). La peur devient son quotidien, l'espoir son moteur de survie. Elle sera transformée à jamais, tout comme les hommes qui partagent sa vie: les conséquences de la guerre et de ses horreurs. Dans une belle scène, un peu convenue certes, elle soulage la souffrance d’un soldat allemand, oubliant qu’il est l’ennemi, le consolant parce que c’est avant tout un homme. Il y a une part sacrificielle dans ce personnage féminin (qui écrira 15 ans plus tard Testament of Youth, Mémoires de jeunesse, récit impitoyable contre l’absurdité de la guerre, sans s’imaginer que 6 ans plus tard, les Européens allaient de nouveau s’entretuer). Vera enterre ses rêves comme elle enterre ses hommes. Sur le front, en première ligne, elle nous guide au milieu des cadavres, de la puanteur (hollywoodienne) de la mort.
James Kent signe ici un film poignant, déroutant et, par moment, réellement inspiré, notamment lorsqu’il fait respirer son œuvre de quelques métaphores visuelles intéressantes. Cet onirisme est hélas souvent contraint par le récit trop linéaire, trop classique. Mais l’essentiel est bien d’avoir su ressusciter l’esprit de Vera. Elle ne souhaitait plus de guerre : "pas de vengeance, pas de tuerie... assez!". On peut la comprendre : sa jeunesse fut fracassée par l’Histoire. Alicia Vikander incarne parfaitement sa force, son courage, mais aussi cette vulnérabilité, ses doutes face à une vie qui ne lui a rien épargné.
Cynthia
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