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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Les chaises musicales
France / 2015
29.07.2015
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PRINCE CHARMÉ
"Croyez-moi, vous êtes faite pour les retraités précaires !"
Perrine, l’héroïne des Chaises musicales, est l’anti working girl vantée à longueur d’année par les magazines féminins. A presque 40 ans, elle n’a pas de travail régulier, vit seule et semble toujours un peu à côté de sa vie. Comme dans le jeu qui sert de titre au film, elle cherche sa place.
Pour incarner ce magnifique personnage lunaire, la réalisatrice Marie Belhomme a fait appel à Isabelle Carré, parfaite de maladresse ingénue et de persévérance fantasque. Toutes deux écrivent à quatre mains une partition virtuose où se succèdent les situations décalées, les répliques savoureuses et les gags désarmants. On est dans une comédie romantique où les deux tourtereaux ne se voient jamais, dans un conte de fées dans lequel c’est le "Prince charmant" qui dort en attendant que sa bien-aimée le réveille, dans un jeu de chaises musicales où l’héroïne vole la vie de l’homme qu’elle aime, en bref, dans un film qui n’hésite pas à dynamiter les codes du genre pour inventer les siens.
C’est non seulement très drôle, mais aussi très juste, surtout quand il s’agit d’observer le mécanisme de la culpabilité ou l’enchaînement incontrôlable des conséquences suite à un simple mensonge. Les seconds rôles sont également très bien écrits, ce qui leur permet d’exister à l’écran. Et puis bien sûr il y a le personnage de Perrine, presque politique dans sa manière de refuser les stéréotypes traditionnels : oui, on peut être heureux sans être ambitieux, non, les rôles de paumés burlesques ne sont pas l’apanage des hommes. D’ailleurs, Perrine existe ici très bien sans homme, comme en clin d’œil au cinéma hollywoodien qui se plait à cantonner les femmes aux rôles de petites amies-plantes vertes, de mères (forcément possessives) ou de filles (presque toujours rebelles).
Isabelle Carré, qui propose une composition certes proche de celle des Emotifs anonymes, mais dans laquelle la fantaisie aurait remplacé une partie de l’émotivité, parvient à être à la fois irrésistible et touchante. Elle rappelle que ses capacités de jeu sont presque illimitées, entre la folie intériorisée d’une Anne M . et la folie burlesque de cette violoniste déguisée en banane mélancolique. Elle prouve également sa générosité à l’égard d’une jeune réalisatrice, Marie Belhomme, dont elle a su intégrer très subtilement l’univers intime. On croit sans peine en leur complicité telle que la raconte l’actrice dans le long entretien qu’elle nous a accordé. Et ce n’est pas un hasard si, à leur manière spontanée et dénuée de prétention, la réalisatrice et l’actrice proposent le Feel good movie de l’été. MpM
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