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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Life
USA / 2015
09.09.2015
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LA LÉGENDE DE JIMMY
Tout commence dans la chambre rouge du photographe Dennis Stock (Robert Pattinson, sympathique mais pas transcendant), des clichés baignent dans le liquide magique avant d'être extirpés et suspendus par leur créateur. Rien d'incroyable concernant ce tirage qui semble normal et qui ne décroche même pas un sourire à notre protagoniste. Il n'a pas eu le coup de foudre artistique comme le souhaite souvent les gens de sa profession... jusqu'à cette fameuse soirée où un certain James Dean (Dane Dehaan insolent et sexy) croise son chemin. Et quel chemin: le futur héros du film La Fureur de vivre n'en a que faire de la promo et des photos. Entre sa moto, sa copine (on zappe les épisodes embarrassants de sa sexualité) et sa perpétuelle cigarette au bec (ce qui le rend terriblement bandant), l'acteur sème le trouble dans l'esprit de ce jeune photographe divorcé et papa à mi-temps. Une attirance refoulée? La légende dit que oui, le film l'évoque dans certains regards et questions:
"- Tu es marié?
- Non...
- Une petite amie?
- Non...
-Divorcé...et toi?
- Tu ne lis pas les magazines?".
Ce petit photographe amateur va pénétrer dans le quotidien d'une future légende Hollywoodienne sans crier gare. Virée à New-York puis dans sa ville natale, beuverie, bal de promo ou dîner en famille, James Dean et Dennis Stock vont dépasser la simple relation d'un photographe et de son modèle durant une durée assez longue. Il arrivera à pénétrer sa carapace d'impertinence pour y découvrir une douceur et une sensibilité inconnue jusqu'à lors chez James Dean: la perte de sa mère et son anecdote tragique sur l'enterrement de cette dernière, l'amour pour sa ferme natale, sa dévotion religieuse, sa simplicité aux antipodes de L.A. ou encore cette tristesse d'être loin de son passé, loin des siens...
Faire un film sur James Dean tout le monde en rêvait. Des téléfilms l'ont ressuscité. Et Anton Corbijn l'a fait pour le grand écran, 8 ans après le leader de Joy Division, Ian Curtis. Ne vous attendez pas à un biopic à la James Brown comme l'année dernière (Get It On). Le film raconte la naissance d'une star par un spectre icônique, de son passage vers la lumière grâce aux clichés d'un photographe motivé. Life veut montrer l'homme derrière l'image que l'industrie Hollywoodienne lui a imposé: "Tu souris, tu dis des choses adorables sur le réalisateur et c'est tout!"
Contre toutes attentes, Life (intitulé comme le magazine américain qui diffusera les photos) est un film doux, prenant et qui donne à réfléchir sur les souvenirs, les changements dans une vie et la peur qui les accompagne. Life porte bien son nom car il est avant tout un film sur la vie, plutôt qu'un portrait d'un système, d'une époque, de deux métiers, d'ambitions ou même d'une jeunesse ambitieuse.
C'est presque surprenant de la part d'un cinéaste qui fut avant tout un photographe. En l'occurrence celui de Ian Curtis (qui lui inspira donc Control, suicidé un an après le reportage de Corbijn. Les destins se croisent. 60 ans après la mort de James Dean, le film vaut surtout par cet éclairage narcissique sur son ancien métier: James Dean aurait-il été la Légende de Jimmy que l'on connaît sans l'oeil, le regard, le flair d'un photographe? Le regard de l'autre est-il nécessaire pour mettre en lumière l'intensité de celui qui veut briller de mille feux?
C'est toute la limite du film qui préfère donner le rôle du héros au photographe plutôt que de chercher une esthétique et une réflexion sur la pression qu'impose la célébrité. Avec un scénario assez classique, un jeu très hollywoodien misant davantage sur le mimétisme que l'interprétation, et quelques séquences comiques, cette reconstitution historique trop précise empêche Life de s'émanciper pleinement , alors qu'en arrière plan la critique d'une période conformiste et d'une machinerie cruelle auraient pu conduire le réalisateur à une oeuvre moins convenue mais plus granuleuse. Cynthia
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