Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Capturing The Friedmans


USA / 2003

07.04.04
 



MARIES, TROIS ENFANTS





"-J'ai peut-être commencer à filmer pour ne pas avoir à me souvenir moi-même"

Impressionnant, épatant, dérangeant... Difficile de trouver adjectif assez fort pour résumer le choc ressenti au terme de The Capturing The Friedmans. Un sentiment étrange qui perdure. Et s'étend bien au-delà de la projection. Le spectateur une fois de plus n'en sort indemne. La faute à Andrew Jarecki. Refusant subtilement d'endosser l'uniforme d'un petit Hercule Poirot, le réalisateur ne s'amuse jamais à élucider l'affaire. A demasquer les coupables ou à réhabiliter qui que ce soit. Au contraire. Le réalisateur préfère installer le doute. Dans un "fait-divers" qui n'en manque pas.
La journée précédant la divulgation de l'affaire via la presse, les Friedman sont une famille parmi tant d'autres. Un "clan" uni et aisé d'un quartier pavillonnaire de Long Island. Un père enseignant apprécié de tous. Trois rejetons énergiques chouchoutés par une mère comblée. Les voisins rêvés. Jarecki ne va pas à l'encontre de ce portrait idyllique. Les Friedman d'ailleurs lui ont gentiment facilité la tâche. Pas un goûter, un repas, une soirée télé n'a échappé à la caméra familiale. La télé-réalité avant l'heure. Papa jubile, maman sourie et David, Seth et Jesse sautillent à n'en plus pouvoir.

Jusqu'à ce dramatique Thanksgiving 1987. Le ton élégiaque s'éffrite. Sans que notre sympathie pour les Friedman n'en souffre. L'intrusion de la police, la sauvagerie des journalistes, le désespoir d'Elaine et David accentuent cette "solidarité". Avant le grand déballage. Le réalisateur nous prend alors à contre-pied. Se joue des sentiments et des regards portés sur les accusés. Les révélations précises des enquêteurs et des victimes présumées, les magazines de pornographie enfantine puis le portrait psychologique d'Arnold Friedman bouleversent la donne. Celui que nous scrutions avec respect voire compassion ne mérite dés lors que la pitié et les insultes. Le monstre est là devant nous. Pas de doute.

Mais Capturing The Friedman n'en finit pas de surprendre. Dans une dernière partie ébouriffante le Friedman's show s'ouvre au public. En plein chaos la caméra familiale continue de tourner. Et vole des instants de vie surréalistes. La famille se déchire. Sous nos yeux. Deux clans distincts s'opposent. Enfants d'un côté. Mère de l'autre. Au milieu Arnold Friedman impassible et serein. Les hommes rient et plaisantent de son futur séjour derrière les barreaux. Improvisent des adieux caustiques. Le spectateur devient voyeur. En contrepoint Jarecki aborde les multiples zones d'ombres de l'enquête. La pression policière exercée sur les victimes. Nos certitudes s'envolent. Le doute prend place. Coupables ou non Arnold et Jesse eux paradent joyeusement dans le salon. Provocation, inconscience ou humour noir ? Mise en scène ou spontanéité ? Autant de question sans réponse. Comme un effroyable secret de famille.
 
jean françois

 
 
 
 

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