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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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A second chance (En chance til)
/ 2015
13.01.2015
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UNE CHANCE DE TROP
"Pour vous, les gens comme moi ne devraient pas avoir d’enfants. "
La réalisatrice danoise Suzanne Bier (Open hearts, After the wedding) est de retour avec un drame social chargé dans lequel évoluent en parallèle deux couples avec bébé que tout oppose : les premiers incarnent la perfection et la réussite dans leur jolie maison bien rangée où ils respirent le bonheur tandis que les seconds sont des junkies misérables qui négligent leur fils. Immanquablement (et on le voit arriver à des kilomètres), le sort se charge de brouiller les cartes en mettant le père et mari idéal face à un dilemme moral inextricable.
Sur le papier, l’idée est intéressante, car elle permet de questionner la notion de justice (faire ce qui est juste ou ce qui est bien) tout en décortiquant la manière dont chacun, même le plus droit, s’autorise à renoncer à ses principes lorsque sa propre survie entre en jeu. Pourtant, à cause d’une mise en scène appuyée et d’un scénario qui manque de subtilité, le film s’enferme dans une démonstration didactique qui s’avère au fond extrêmement morale. A la place d’une véritable réflexion sur les préjugés de classe, la difficulté de faire face au deuil ou la tentation de se transformer en justicier au mépris de toute légalité, Suzanne Bier joue la carte de l’émotion et du mélodrame, justifiant le comportement de son héros par un épilogue lourdingue et l’exonérant au finale de toute responsabilité.
On notera d’ailleurs que dans un film qui aborde quand même la maternité sous toutes ses formes (même si c’est avec un certain manichéisme), c’est encore et toujours l’homme qui reste au centre du récit. Or si son point de vue apporte une vraie force tragique à la situation, on aurait aimé que la souffrance des deux mères ne soient pas cantonnées à des points de détail vite évacués. Par ailleurs, mais sans doute est-ce trop demander, il aurait sûrement été intéressant de proposer des personnages (surtout féminins, mais pas seulement) qui aillent au-delà du simple stéréotype. Par exemple, quand on voit l’hystérie de l’épouse du policier qui roule des yeux, crie, s’effondre en larmes, avant d’éclater de rire et de jouer la mère parfaite, on se demande a minima comment son mari a fait pour ne pas se rendre compte qu’elle a un problème. Si l’on est un peu méchant, on se demande surtout comment elle a pu être aussi mal dirigée…
Maladresse ou problème de dosage ? Toujours est-il que Suzanne Bier semble souffrir du syndrome de l’élève trop appliqué : à vouloir trop bien faire, et notamment éviter toute stigmatisation, elle se fourvoie dans un film qui évite les vrais sujets au profit d’une intrigue mélodramatique et profondément politiquement correcte.
MpM
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