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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Quand on a 17 ans
France / 2015
30.03.2016
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LE PLUS BEL AGE
"- Tu n’as pas assez confiance !
- En qui ?
- En toi, en les autres, en la vie. "
Récit initiatique en apparence studieux, Quand on a 17 ans dévoile peu à peu la richesse d’un scénario extrêmement précis, ancré dans son époque, et d’une formidable acuité sur la complexité des relations humaines. Au premier coup d’œil, on sait que l’on est dans le cinéma si minutieux d’André Téchiné, où tout est scrupuleusement pensé et mesuré.
Suivant le rythme très découpé d’une année scolaire avec ses trois trimestres distincts, le réalisateur prend le temps de poser son récit, d'installer des intrigues secondaires qui sont autant de fondations, et surtout de caractériser ses personnages. Il y a bien sûr les deux adolescents que tout semble opposer : l'intellectuel et le costaud, le fils du médecin et l'enfant adopté par des cultivateurs, le gars de la plaine et celui du haut de la montagne. Immédiatement, cela fourmille de thèmes et de sous-texte.
Il y a également leurs parents (Sandrine Kiberlain en tête, parfaite dans le rôle de cette mère fantasque et joyeuse, mariée à un médecin militaire qui risque sans cesse sa vie à l’autre bout du monde), que Téchiné inclut largement au récit, prenant le contrepied des habituels films sur une adolescence évoluant dans sa propre sphère, loin du monde des adultes. Il est en cela d'une redoutable modernité, montrant notamment une relation mère-fils harmonieuse et simple qui dynamite les clichés du genre.
Narration limpide et évidente
Et puis, au fur et à mesure qu'avance le film, le réalisateur continue de nourrir le scénario avec des intrigues parallèles qui tour à tour font écho à l'histoire des deux adolescents, ou lui servent de catalyseur. Cela permet de faire exister les personnages plus secondaires et de garder une grande homogénéité dans la narration qui devient limpide et presque évidente, tout en ménageant surprises, chemins de traverse et rebondissements.
Car si, au départ, on croit voir arriver les grosses ficelles du scénario, on s'aperçoit rapidement que Téchiné neutralise tout ce qui pourrait être outré, se contente de suggérer ce qui est indispensable, et s'amuse avec les attentes du spectateur. Passée une première demi-heure hésitante, le film bascule ainsi dans un mélange d'humour, de douceur et de complicité qui rend la situation de départ éminemment plus subtile qu'elle ne le paraissait au départ.
Corps à corps sensuels
On est alors bouleversé par la manière dont le cinéaste (âgé tout de même de 72 ans) s'approprie les affres de l'adolescence et filme avec grâce leurs corps à corps brutaux, expiatoires et ambigus. Il capte avec une simplicité déconcertante cet aspect purement physique de la relation conflictuelle entre les deux jeunes hommes qui ont besoin de passer par les coups pour en arriver aux mots. Puis aux gestes d'amour, filmés eux-aussi avec une sensualité spontanée, sans effets ni calculs.
Interrogé par l'AFP sur cette place de l'homosexualité dans son œuvre (souvent sous un angle très charnel), André Téchiné a la réponse la plus intelligente qui soit : "L'hétérosexualité prend quand même dans les fictions beaucoup de place, donc peut-être qu'on peut aussi laisser un peu de place pour montrer autre chose qui n'a pas l'habitude d'être regardé".
Et d'ailleurs comme souvent, il n'est pas tant question dans Quand on a 17 ans d'homosexualité que de la rencontre amoureuse entre deux adolescents qui s'avèrent être des garçons. Nuance de taille pour un film lumineux qui prend le sujet de l'adolescence à bras le corps mais joue la carte de la retenue, du sens du détail et d’une bienvenue légèreté.
MpM
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