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WAKING LIFE
On sort très perplexe de Everybody Wants Some. On est séduit, on ne peut que l’être tant le cinéaste a acquis une maturité en matière de direction d’acteurs, d’esthétique visuelle, de travail soigné de la musique (la BOF est formidable). En signant le portrait d’une génération, avec son côté vintage, il réalise un film sur une jeunesse aussi joyeuse qu’angoissée, qui fait écho à celle d’aujourd’hui.
On est moins convaincu par la superficialité et les stéréotypes de ce film quasiment autobiographique. Certes, il dévie de la comédie adolescente classique, tout en s’inscrivant dans l’héritage d’un John Hugues. Mais il ne va pas beaucoup plus loin que l'arrivée du petit nouveau, la paresse, la fête, les rivalités, les bizutages, la drague, bref tout ce qu’on a déjà vu. Le but dans la vie est d'enfreindre les interdits... Mais contrairement à un Spring Breakers ou un Kaboom, il se refuse à emprunter le chemin de la pure fiction, préférant finalement un « document » convenu, et assez long, sur le passage initiatique de l’adolescence à la jeunesse, de l’insouciance à l’inconscience.
Cependant, l’ambiance potache sauve l’ensemble et contamine le spectateur, malgré le manque d’originalité et l’absence d’enjeu dramatique. On ne peut que sourire devant ces Apollons américains, paquet moulés dans des jean's et des shorts, muscles saillants sous des tee-shirts ajustés, moustachus le plus souvent. On pourrait presque croire à des acteurs pornos de Boogie Nights ou des fantasmes gays d’une autre époque.
Ça pue la testostérone, la vanne à deux balles, les situations cocasses. Les machos sont en bande, comme sous l'emprise d'une secte où il ne faut pas se distinguer. Sport, sexe, amitié, et débauche en général, cette meute de loups apparaît presque comme un portrait caricatural d’une Amérique où les filles sont canons et les mecs des étalons.
Reste que Everybody Wants Some apparaît comme trop simpliste et trop nostalgique pour marquer les esprits. Le divertissement est palpable, on passe un bon moment, les scènes s’enchaînent sans heurts. Mais la reconstitution trop parfaite de cette époque, le manque de grain à l’image, le manque de folie dans le récit produisent au final une chronique un peu artificielle, comme un rêve.
Heureusement, le « héros », celui sans pilosité entre le nez et la bouche, revendique une véritable liberté, une insoumission rebelle, une aspiration à un monde différent, qui donne une tonalité un peu moins classique à la comédie.
D’autant plus que le réalisateur de Boyhood a un génie propre pour filmer les détails, les expressions, les regards, les gestes qui mettent du relief à un film de « genre », autrement dit « codé ». Il y a alors une forme de mélancolie qui se mélange avec du kitsch, comme pour illustrer le regret d’une époque. Une période où le groupe prévalait sur l’individu, où tout était possible, où le fantasme paraissait réel. Où l'on s'amusait avant tout.
vincy
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