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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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L'idéal
France / 2016
15.06.2016
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SOIS BELLE ET FERME LA!
"Si on vire les moches ça s'appelle la mode...c'est que du bon sens!"
L'idéal, second long-métrage de Beigbeder et présenté comme la suite de 99 francs, s'annonce telle une critique ironique de la société et de ses diktats de la minceur, de la beauté surfaite et de la mode. Si le scénario était écrit par Karl Lagerfeld (l'ennemi des rondes) on n'aurait même pas été choqué. Pourtant, ces critiques envers les "moches" et ces femmes à poil et gaulées comme des actrices du X qui se font sauter comme des crêpes à la chandeleur, ne sont que l'hyperbole d'une société soumise à l'image et au superficiel. Beigbeder par son trash et son côté crazy (ce qui fait son charme) a voulu se la jouer parodique et critique avec un abus d’effets et une grosse dose d'humour, sans forcément jouer sur l’originalité, mais en tenant l’efficacité. Pourtant...
L'idéal serait donc une comédie satirique pour celui qui est tout de même derrière le magazine de charme Lui (avec aucune ronde en première page hein) et acteur de la dernière publicité Dim qui en a choqué plus d'un(e) (bouhou la femme-objet dans une publicité ENCORE). De l'humour noir sans doute? Pourtant l'humour, on le cherche à chaque scène, chaque personnage. On ne le trouve pas... L'humour est invisible face à notre consternation devant tant de clichés éculés, une vision si binaire et grossière (pourquoi une décideuse doit-elle forcément être mal baisée ?!).
Face à ce tourbillon de cynisme et de misogynie (la femme ici est une dinde qui rentre dans un 34 et qu'il faut fourrer jusqu'à ce qu'elle ne soit plus baisable), si on voit tout au premier degré, on explore un second degré, un troisième, bref on se plonge dans les abysses de la pensée Beigbederienne comme Di Caprio passe d’un monde à l’autre dans Inception. Mais voilà, contrairement à ses romans, Beigbeder réalisateur ne parvient pas à manier les nuances de ses points de vue avec les images comme il le fait avec sa plume.
Admettons que la vulgarité soit assumée, que la moquerie soit évidente, que le touche-à-tout de Saint Germain des Prés veuille réellement nous faire rire de la manipulation du marketing et veuille vraiment dénoncer cette industrie (soit en la détruisant avec fracas et panache, soit en montrant sa suprématie cruelle), pourquoi avons-nous cette sensation de nausée ?
Sans doute parce qu’il manque une « morale » moins sentimentaliste et plus « politique ». Sans doute parce qu’il manque un esprit de rébellion et un peu punk, là où on ne voit qu’un délire coké d’hétéro sûr de bite, parce qu’il le vaudrait bien. En fait, il manque à L’Idéal ce qui faisait la force de Tout le monde il est beau Tout le monde il est gentil de Jean Yanne : un vrai désespoir, une véritable souffrance humaine et le tout à travers un regard distancé et misanthrope. En cela, on peut reconnaître au cinéaste que le choix du grinçant Gaspard Proust pour incarner son double, la présence d’Audrey Fleurot, la rousse et alors ?, et de Jonathan Lambert, jouissif, est sans doute la meilleure décision pour ce film.
cynthia
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