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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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La Chanson de l'éléphant
/ 2014
03.08.2016
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DU CHOCOLAT POUR TOUS
- Elle vient à l'hôpital te voir, parfois ?
- Elle peut pas. Je l'ai tuée.
Principalement connu pour son récent travail à la télévision, le réalisateur belge Charles Binamé adapte ici la pièce de théâtre éponyme de Nicolas Billon. Et c'est brillant.
Entre Sherlock et Profilage
Le docteur Toby Green est directeur d'un institut psychiatrique. Lorsque l'un de ses collègues disparaît soudainement, il tente de lever le voile sur ce mystère. Pour cela, il part interroger Michael Aleen, un patient plus que torturé et imprévisible. Et cela, alors même que l'infirmière Susan Peterson, son ex-femme, tente de l'en dissuader. En parallèle, la nouvelle épouse de Toby, Olivia, ne cesse d'intervenir pour expliquer à son mari qu'elle ne se sent pas bien.
Très loin du jeu théâtral auquel nous pouvions nous attendre, les acteurs de La Chanson de l'éléphant font ici preuve d'une justesse déconcertante. Liés entre eux, le spectateur sent une véritable alchimie dans ce quatuor plus que réjouissant. En effet, même Carrie-Anne Moss qui incarne un personnage peu nécessaire trouve sa place dans ce huis-clos perturbant. En épouse coincée et envahissante, l'ex Trinity de Matrix s'en sort à merveille.
Mais bien évidemment, le cœur du film repose sur l'interrogatoire ou plutôt la longue conversation entre le Dr Green et Michael. Plutôt bon en directeur d'institut psychiatrique, c'est avec plaisir que l'on retrouve Bruce Greenwood. Quatre ans après Flight et trois ans après Star Trek Into Darkness, ce Canadien de 59 ans a enfin droit à un rôle consistant. Torturé et finalement assez fragile, c'est dans le manque d'attention du Dr Green que se trouvent les réponses à ses propres interrogations. Il convient dès lors de préciser que La Chanson de l'éléphant, au-delà du huis-clos, est un incroyable thriller psychologique qui ne devrait laisser personne indifférent.
Star dans l'âme
Face à Bruce Greenwood, Xavier Dolan, que l'on ne présente plus même si, en tant qu'acteur il est plutôt rare, attire toute la lumière. En mythomane paranoïaque et manipulateur, l'acteur de 27 ans excelle comme jamais. Incroyablement beau, le personnage qu'il incarne, Michael, s'avère de plus en plus complexe au fil des minutes. Et l'on comprend d'autant plus pourquoi le réalisateur de J'ai tué ma mère et Mommy a accepté ce rôle. Visiblement rongé par ses relations conflictuelles avec son père et le décès de sa mère, Michael trouve refuge dans son imaginaire et ses mensonges. A tel point qu'il semble croire à certains d'entre eux.
Personnage touchant et enivrant, Michael a cette chance d'être incarné par un homme dont l'anxiété est reconnue, palpable. De ce fait, impossible de ne pas espérer que l'auteur de Tom à la ferme continue à jouer encore longtemps. Car malgré une mise en scène un peu trop classique, La Chanson de l'éléphant peut compter sur ses trois acteurs principaux (Bruce Greenwood + Xavier Dolan + Catherine Keeper) pour nous emmener très loin. Qui plus est, les scènes traduisant les souvenirs de Michael sont d'une beauté certaine. A commencer par le décès de cet éléphant, abattu par le père de Michael et dont le fantôme hante le film.
En patient homosexuel et amoureux de la mauvaise personne, Xavier Dolan prouve à qui en doutait encore qu'il est aussi bon devant la caméra que derrière. Comme habité par Michael, sa performance est ahurissante de finesse. Et malgré une bande originale très peu emballante, il parvient à nous faire emmener dans ses délires comme il sait si bien faire.
Loin des dialogues trop littéraires redoutés, le film de Charles Binamé n'a aucun mal à s'émanciper de la pièce de Nicolas Billon pour devenir une magnifique œuvre à part entière. Mention spéciale à cette scène au cours de laquelle Xavier Dolan mime une gorge profonde avec la trompe d'un éléphant en peluche... On en redemande !
wyzman
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