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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Where to invade next ?
USA / 2016
14.09.2016
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EUROPEAN VACATION
Il est de retour, et encore une fois il va attaquer son pays, les Etats-Unis, pour mieux le protéger, de son point de vue. Encore une fois il va utiliser ses armes favorites : des questions et une caméra. Cela fait plus d’un quart de siècle qu’il voudrait combattre ce monstre invincible avec ses multiples têtes qu’est le capitalisme avec ses films au cinéma depuis Roger et moi en 1989 jusqu’au dernier Capitalism : A Love Story en 2009. Michael Moore est donc reparti à la charge mais cette fois avec une nouvelle stratégie : après avoir critiqué l’Amérique de l’intérieur il va aller voir ailleurs, en Europe en particulier, ce qui se passe pour en ramener les meilleures idées… Sorte de Tintin reporter qui rêve d'un monde social-démocrate à la scandinave.
Michael Moore reprend donc sa casquette de réalisateur-candide et son bâton de pèlerin (une caméra) pour apporter du souffle au drapeau américain. Sa méthode est toujours la même : il va poser des questions là où il sait trouver les réponses qu’il cherche. Il est tout autant considéré comme le chantre du documentaire engagé que comme le pape du documentaire manipulateur. S'il peut parfois y avoir controverse sur le fond (l'Europe n'est quand même le paradis qu'il semble faire croire), pour la forme tout le monde s’accorde sur l’efficacité et sur l’humour du montage des différentes séquences (« Nos problèmes ne sauraient être réglés par l’armée »). Ses trois documentaires les plus (re)connus sont ceux qui apportent différentes contestations à l’administration du président George W. Bush au pouvoir entre 2001 et 2009 : Bowling for Columbine en 2002 avec le contrôle des armes (Oscar du meilleur documentaire), Fahrenheit 9/11 en 2004 contre la guerre en Irak et la ré-élection de Bush (Palme d’or), et Sicko et le business des labos pharmaceutiques… Depuis aux Etats-Unis il y a eu comme chacun le sait l’arrivée de Barack Obama élu président, et ce n’est pas tout à fait un hasard si Michael Moore qui soutient le parti démocrate a choisi de tourner sa caméra non plus à l’intérieur des Etats-Unis mais plutôt à l’extérieur vers d’autres pays…
Le titre Where to invade next ? est moins une question qu’une affirmation d’une nécessaire remise en cause : plutôt que d'attaquer et d'envahir d’autres contrées au nom de ‘sa’ liberté, le documentariste essaie de (sa)voir si on ne pourrait pas apprendre quelques leçons des autres pays. Par exemple au Portugal on entendra que « la peine de mort va à l’encontre de la dignité humaine ». Ce nouveau film est tout d’abord à destination du public américain, pendant deux heures on y voit Michael Moore visiter différents pays d’Europe sur différents thèmes comme l’organisation du travail, de l’éducation, de la justice, de la parité… L’impact du film est forcément moindre pour le public français puisque tout ce que découvre Michael Moore comme avantages à exporter vers les Etats-Unis n'est finalement que la somme de nos acquis. En fait la résonance du film est différente, il s’agit de mesurer le contraste entre nos normes (que l’on redécouvre positives) et les pratiques américaines (à l’inverse négatives). Avec chaque pays visité Michael Moore fait (semblant de) découvrir une avancée sociale à priori étonnante pour lui en tant que américain, et on s’étonnera d’ailleurs que pour la plupart nous en bénéficions déjà en France.
Ainsi, en Italie, Michael Moore découvre que les gens ont droit à 35 jours de congés payés, à un 13e mois de salaire, à un congé maternité ; qu'en France, les cantines des écoles proposent aux enfants des menus équilibrés avec de l’eau à table plutôt que du soda et que l’impôt est mieux utilisé au bénéfice de tous ; qu'en Finlande, pays avec le meilleur taux d’éducation, on se soucie beaucoup du développement de la curiosité d’apprendre des élèves (et pas des QCM où faut trouver la bonne réponse parmi quatre proposées); qu'en Slovénie les études universitaires sont gratuites; qu'en Allemagne on transmet le devoir de mémoire de l’holocauste (aux Etats-Unis il y a peu de temps encore il n’y avait pas de musée sur l’esclavage…) ; qu'au Portugal être en possession d’une petite dose de drogue n’est pas un motif d’arrestation (être envoyé dans une prison américaine c’est ne plus avoir le droit de vote…); qu'en Norvège une prison modèle sur une île avec 115 détenus qui ont les clés de leur chambre et seulement 4 gardiens élimine le taux de récidive et permet une réhabilitation; qu'en Tunisie des femmes se sont battues pour le droit à choisir contraception et avortement (question délicate dans certains endroits des Etats-Unis); qu'en Islande il y a beaucoup plus de femmes au pouvoir dans les entreprises et en politique et qu’on y condamne les banquiers responsables de la crise en prison… Bref avec son sens de l’à propos habituel Michael Moore mélange des témoignages filmés par lui, d’autres images d’actualité ou des statistiques pour démontrer que certaines de ces mesures à priori incroyables sont un bénéfice pour l’ensemble de la société : citoyens et entreprises et gouvernement.
On pourra facilement taxer Michael Moore de manipulateur tant il présente des situations trop idylliques et de multiples raccourcis naïfs, mais le but est évidement de réfléchir à un idéal. Pour aller plus loin dans cette direction avec plus de sérieux il sera toujours bon de (re)voir Demain de Cyril Dion et Mélanie Laurent (alimentation, énergie, économie, démocratie, éducation…). Where to invade next ? est rythmé de manière à être irrévérencieux tout en étant sérieux, surprenant et amusant. On pourra noter quelques séquences féministes (« women don’t use war, they use words ») qui résonnent comme un soutien une candidature féminine au poste suprême (même s'il était pour le rival de Clinton, Sanders), et quelques scènes qui bien que datant du début 2015 dénoncent la problématique du racisme devenue brûlante courant 2016 dans les médias américains (la violence de certains policiers…). Where to invade next ? évoque en creux certains des nombreux inconvénients de vivre aux Etats-Unis. C'et le paradoxe de ce documentaire américain: il tue l'American Dream, de manière binaire, ludique, naïve. Kristofy
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