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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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L'Attrape-rêves (Aloft)
Espagne / 2014
26.10.2016
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LE FILS ABANDONNÉ
«- Tu seras désillusionnée comme tous ces psychos de groupies.»
L’attrape-rêves est un film aussi étrange que son amorce, très naturaliste et presque dérangeante : l’accouchement d’une truie, qui précède une séquence de baise. Dans un environnement assez hostile, le film de Claudia Llosa (Fausta) se perd souvent dans son propos, évacuant le diktat de l’émotion et cherchant une voie possible, cinématographique, dans ce récit confus.
Il y a les migrations, l’écologie, la foi qui s’entremêlent dans cette histoire de retrouvailles entre une mère et son fils. Claudia Llosa abuse peut-être des allégories, comme celle de ce faucon devenu responsable des maux de gens cruels et presque détraqués. Cependant, elle ne facilite pas la vie du spectateur avec un drame assez plombant (une tumeur qui appelle un miracle). La relation compliquée entre la mère et son fils est beaucoup plus convenue. Le scénario est assommé par des banalités ou des inutilités (comme cette scène de sexe entre Cillian Murphy et Mélanie Laurent) qui font douter d’une véritable rigueur d’écriture.
Il reste les magnifiques espaces du côté de Nunavut, linceul de glace infini. Cette randonnée extrême et polaire, sur ce chemin de glace, est proprement cinématographique. Et dans ces contrées désolées, presque à l’écart du monde, les mystères s’épaississent entre passé et présent. Mais on décroche très rapidement tant le film subit sa narration pesante. A croire que la vie n’est que pessimisme et foi, cruauté et souffrance, révolte et résistance
Si on peut comprendre que le sujet même ne nous accroche pas (l’espérance, le miracle, etc…), il y avait matière, malgré tout, à réaliser un film moins évanescent et moins didactique. Claudia Llosa aime croire que ses personnages peuvent changer leur vie ou celle des autres. Dans ces tragédies, un peu pénibles, il n’est question finalement que de culpabilité, de pardon, de guérison. Elle veut réparer les vivants, mais chez elle, tout le monde semble amorphe, anesthésié. D’accidents en hantise, de traumas en rédemptions, L’attrape-rêves s’avère plutôt une traversée de l’enfer (blanc) où l’on défie la vie par peur de la mort. Et tout cela pour aboutir à quoi ? Un film long, sans légèreté aucune, où l’art et la nature servent de croyances émancipatrices. Où une secte autour d’une gourou/guérisseuse est presque légitimée. On cherche encore la métaphore tant le premier degré écrase la lecture de cette « épopée » glaciale et glaçante.
Voici donc un cauchemar où le sacrifice est érigé en philosophie, où le lien maternel est réduit à sa plus stricte part animale, où la fatalité apaise les consciences, où l’homme n’est plus qu’un élément d’un environnement... Tout est trouble. Brouillon.
Et pourtant, esthétiquement, c’est beau. Abstrait, vide, distant. Mais beau. Comme une vie dénuée de sentiments, observée de loin, sans empathie particulière pour les êtres. La cinéaste est finalement aussi cruelle que ses personnages : elle joue avec, dans un beau décor, en demeurant complaisante avec ses obsessions bizarres.
vincy
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