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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Tu ne tueras point (Hacksaw Ridge)
USA / 2015
09.11.2016
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IL FAUT SAUVER LE SOLDAT DOBBS
Après Braveheart, La Passion du Christ et Apocalypto, Mel Gibson est de retour derrière la caméra pour ce qui est de loin son meilleur film.
Foi et incompréhension
Objecteur de conscience, Desmond Doss s'engage volontairement pendant la Seconde guerre mondiale. Néanmoins, il refuse de tuer ou de porter une arme en raison de ses croyances. Affecté au poste d'auxiliaire sanitaire, il va découvrir l'enfer de la guerre au cours de la bataille d'Okinawa (Japon).
Inspiré d'une histoire vraie, le nouveau film de Mel Gibson est aussi incroyable que son sujet. A un moment où croyances et convictions sont régulièrement mises en contradiction avec les notions de devoir et de fonction, Tu ne tueras point fait un bien fou. Atypique et déconcertant, ce film de guerre présenté hors compétition à la dernière Mostra de Venise parvient à rendre intelligible les deux camps qui s'opposent ici. Pour des raisons évidentes et expliquées dans la seconde partie, Desmond Doss refuse d'utiliser une arme. Soit. Mais en temps de guerre, ne faut-il pas revoir ses principes ? Telle est finalement la question que pose Tu ne tueras point. Un point de vue sur l'objection de conscience qui pourrait s'appliquer à des cas très actuels dans notre société... La foi a toujours été un moteur pour le cinéaste, qu'elle soit patriotique ou religieuse. Droits dans leurs convictions ses héros ont toujours été portés par une croyance qui les poussaient jusqu'à leurs limites, quitte à se sacrifier.
Mais, plus encore, le film laisse au spectateur la possibilité de trouver sa propre réponse, de se mettre à la place des protagonistes et de se ranger dans tel ou tel camp. Bien évidemment, film hollywoodien oblige, Tu ne tueras point est pétri de bonnes intentions, de séquences émouvantes et de personnages attachants. A l'image de Smitty, le soldat arrogant et faussement opposé à la présence de Doss dans leur unité. Sans surprise, le spectateur est amené à apprécier la détermination du soldat qui ne voulait pas être un militaire. Son courage, qualifié de miracle par certains, fait chaud au cœur et a le mérite de nous rappeler à tous que plus les temps sont durs, plus l'être humain peut nous surprendre. Et sans entrer dans les détails, il faut bien reconnaître que la relation entre Desmond et son père est très représentative de cela.
Traumatisme et peur
Très porté sur la psychologie des personnages et les rapports humains, Tu ne tueras point demeure un film de guerre. Malgré un budget de "seulement" 40 millions de dollars, Mel Gibson parvient à faire beaucoup et on ne peut qu'applaudir. Violente et sans répit, la deuxième partie du film montre l'horreur et les atrocités du front quand la première s'évertuait à faire doucement entrer Dobbs dans le monde adulte. Le choc est total et assourdissant pour le personnage campé par Andrew Garfield mais également pour le spectateur. Les moments de suspense sont nombreux, la peur de mourir est palpable et la nausée ne touche pas que les jeunes hommes à l'écran. Sombre dans sa manière de représenter les champs de bataille, Tu ne tueras point dépasse aisément nos attentes. Gibson aime le réalisme, s'affranchit des tabous esthétiques pour exposer l'horreur sans complaisance.
La troupe de golden boys embauchés pour jouer les braves n'est pas étrangère à la réussite du film. Au hasard, on retrouve ainsi Sam Worthington (Avatar), Vince Vaughn (True Detective), Luke Bracey (Point Break), Nathaniel Buzolic (The Originals) et Luke Pegler (Spartacus). Si les morts sont nombreux, il convient de noter que les têtes d'affiche sont largement épargnées et que, gimmick oblige, Mel Gibson n'a pas lésiné sur les compositions quasi christiques. Sa mise en scène fonctionne à merveille et le montage est des plus percutants. A 60 ans, celui que l'on a découvert dans Mad Max a donc enfin trouvé sa place : derrière la caméra ! Il a son style, son œuvre, sa cohérence avec une filmographie qui prend racine dans la résistance des minorités, de ceux qui ont raison avant les autres, et en payent lourdement le prix.
Âpre et hallucinant, Tu ne tueras point mérite son interdiction aux moins de 12 ans. Néanmoins, il n'en est pas moins stupéfiant de brillance. Plus dur que Lettres d'Iwo Jima et moins caricatural qu'American Sniper, le dernier rejeton de Mel Gibson a toutes les chances de marquer les esprits !
wyzman
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