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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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American Pastoral
USA / 2016
28.12.2016
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THE AMERICAN STAIN
«- Tu t’accroches à l’idée de ton enfant innocente ! »
Pour son premier film, Ewan McGregor ne s’est pas facilité la tâche : adapter un monument de la littérature comme Pastorale américaine de Philip Roth est même une gageure. Le résultat est d’ailleurs très loin de la dimension politique de l’œuvre originelle. American Pastoral adoucit le propos de l’écrivain pour devenir une chronique familiale tragique. Le film s’avère finalement assez suave. Ni désagréable, ni raté. Juste trop édulcoré et trop centré sur une relation père fille qui, jamais, n’est rendue attachante.
Bien sûr, le film (dé)montre bien comme le rêve américain a été saccagé à parti des années 1960, sans que le primo-réalisateur ne prenne réellement parti pour l’un des deux camps : les activistes ou les conservateurs. Ce rêve est illustré par une famille parfaite, prospère et heureuse. A un détail près : la progéniture, adorable blondinette, bégaye. Ce bug linguistique est le déclencheur du déraillement général, de l’inceste frustré à la violence criminelle de l’époque.
Bien interprété, joliment filmé, American Pastoral ne veut pas être le Requiem d’une Amérique nostalgique. La mise en scène est trop plate et le scénario trop didactique pour donner du relief, de la subversion au récit. Une seule lecture est possible : l’illusion et l’obsession d’un père voulant retrouver sa vie d’avant, et donc sa fille, sa femme, etc… Il y a quelques belles scènes : la fille amoureuse de son père, l‘épouse qui retrouve une seconde jeunesse...
Cela ne suffit pas à se laisser emporter par une histoire célébrant la fin de l’innocence. Même la castration psychologique du père/époux/patron (toujours dominé par les femmes) est trop superficiellement mise à plat pour en tirer quelque chose de plus intéressant qu’une séquence conflictuelle. Le scénario survole trop de détails (de la délocalisation industrielle aux sectes) pour qu’y porte une intention particulière.
Tout est très classique dans le traitement. On peut quand même souligner que les parents sont finalement les victimes de leurs enfants. C’est bien dans la désagrégation du couple, dans la décomposition de la famille que le film sonne le plus juste. Le reste a surtout l’apparence d’un livre d’images un peu clichées et de séquences un peu factices, même lorsqu’il s’agit de dépeindre, encore une fois trop en surface, cette face cachée de l’Amérique.
La destruction intérieure (car un coup de botox ne suffit pas à réparer ce qui nous ronge le corps) et la décomposition extérieure (car à fuir la justice pour des crimes dont on est responsable, on en paye le prix) sont paradoxalement trop esthétisées pour être palpables, touchantes.
Il faut bizarrement attendre la scène finale pour qu’on éprouve une sensation de cinéma, avec sa part de mystère et de beauté. Un moment freudien qui traduit l’impossible réconciliation de deux Amériques qui ne savent pas dialoguer. Là, pour le coup, c’est toujours d’actualité.
vincy
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