Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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T2 Trainspotting


/ 2017

01.03.2017
 



CEUX QUI VOULAIENT SE SOUVENIR





"T'es accro. Alors sois accro... mais à autre chose"

On les a quittés il y a vingt ans et on les retrouve presque comme si c'était hier. Toute la bande de Trainspotting est au rendez-vous pour ces retrouvailles qui n'avaient d'autre choix que d'être à la hauteur de l'attente, voire au-delà, et qui parviennent presque miraculeusement à renouer avec le ton (sous amphétamine) du premier film tout en en renouvelant intelligemment le propos.

L'argument de départ est simple, mais solide : vingt ans après sa trahison, Mark Renton revient dans sa ville natale et retrouve deux de ses anciens amis, Spud et Simon. En parallèle, Begbie continue à nourrir des projets de vengeance sanglante envers lui. Partant de là, Danny Boyle tisse un film incroyablement nostalgique où les enjeux présents ne cessent de s'entremêler (visuellement et symboliquement) avec les souvenirs du passé. Cela passe par l'incrustation de scènes symboliques de Trainspotting dans des scènes de T2 ou encore par des flashs-backs très brefs, presque oniriques, montrant notamment les personnages enfants.

Mais c'est surtout dans les dialogues et le cœur de l'intrigue que fourmillent les références à ce passé qu'aucun d'entre eux ne veut abandonner. On a ainsi l'impression que le récit d'origine hante à la fois les personnages et le film, empêchant les premiers d'avancer, mais offrant au contraire une immense force dramatique au second. Car au lieu de rester dans l'état d'esprit d'une simple suite, Danny Boyle se place dans la posture de l'artiste revisitant son oeuvre pour la révéler sous un autre jour et lui offrir rétrospectivement un niveau de lecture supplémentaire.

Le passé, une nouvelle forme de drogue dure

Là où Trainspotting débordait d'une énergie positive et s'achevait sur un message d'espoir, T2 se perçoit alors comme un bilan, terriblement désenchanté, où s'additionnent les rêves partis en fumée, les trahisons honteuses, les échecs cuisants, et le sentiment d'être passé à côté de sa vie. Il ne reste alors à Renton et aux autres que les souvenirs du passé, auxquels ils se raccrochent tous avec l'énergie du désespoir, comme à une nouvelle forme de drogue dure. L'époque a changé (de nouvelles combines ont remplacé les anciennes, et les fils de gangsters se mettent à vouloir faire des études), mais eux-aussi, même s'ils refusent de l'admettre. A moins que cela ne soit justement le contraire : tout a changé, pour qu'au final rien ne change vraiment.

Pour autant, Danny Boyle et son scénariste John Hodge n'ont rien perdu ni de leur mordant, ni de leur humour. Malgré sa tonalité pessimiste, T2 multiplie en effet les dialogues fleuris et hilarants, les situations absurdes, les clins d’œil décalés. Cet humour décapant vient sans cesse rappeler au spectateur qu'il ne faut pas prendre le récit trop au sérieux, que ce soit dans ses outrances scénaristiques ou dans sa noirceur désabusée.

Et puis, bien sûr, il y a la forme. Stylistiquement, T2 est un travail d'orfèvre qui élève le montage cut au rang d'art, et propose la bande originale la plus décapante depuis... Trainspotting ? Là encore, les deux films se répondent avec finesse, certains titres se faisant brillamment écho à vingt ans d'intervalle, et finissant par boucler la boucle. Danny Boyle imagine également des cadres insensés, des angles de prises de vue détonants, des juxtapositions audacieuses. On adore la scène hallucinée de soirée sur fond de Queen, la course poursuite dans le parking souterrain, la tirade phénoménale de Renton inspirée du "Choose life" du premier film, la séquence "nostalgie" entre Spud (qui prend ici une réelle épaisseur) et Begbie... En gros on aime presque tout, à une facilité de scénario-près vers la fin, et encore.

De nombreuses suites sont purement gratuites, déclinaisons mercantiles d'anciennes bonnes recettes, mais il faut savoir reconnaître quand une suite peut au contraire redistribuer les cartes et offrir un regard neuf sur le premier volet, sur le monde, et sur le temps qui a passé. Seul, Trainspotting se suffisait complètement à lui-même, mais on ne pourra désormais plus jamais l'imaginer sans T2.
 
MpM

 
 
 
 

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