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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Si tu voyais son coeur
France / 2017
10.01.2018
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ANGE ET DÉMONS
«Tu me dois une vie.»
Pour son premier film, Joan Chemla a sans doute eu les yeux plus gros que le scénario. Si tu voyais son cœur ne parvient jamais à trouver son chemin. Son cinéma se perd dans une surdose d’influences et de références, de Kechiche pour la soirée du mariage en prologue, à Lynch pour cet étrange hôtel social où échouent des paumés.
Dans ce monde violent et sans pitié, elle ne s’attarde pourtant pas à montrer la brutalité et la peur qui cernent le personnage principal, lui même en errance, pour ne pas dire en perdition, glissant progressivement vers la folie, hanté par la mort de son meilleur ami, poursuivit par ses démons et trouvant refuge dans les caresses d’un ange.
Hélas, si Gael Garcia Bernal donne toute sa beauté et son intensité à son personnage paumé, cela ne suffit pas à le faire exister. Jamais, la réalisatrice ne cherche à incarner son film, préférant les spectres et les protagonistes secondaires stéréotypés, comme autant de figures déjà vues jouant des rôles primaires. Le personnage de Bernal est trop taiseux, trop énigmatique pour qu’il puisse être un fil conducteur dans un récit aussi elliptique.
Au gré des rencontres et des épiphénomènes, son chemin de croix mélange les mythes (Orphée, l’Ancien Testament, …) et les styles (naturalisme, onirisme, néoréalisme…). A trop s’éparpiller, la cinéaste créé une distance qui conduit à une forme de désintérêt pour la souffrance de cet homme. Même l’humour absurde (clin d’œil au Magnifique avec un méchant palmé débarquant de nulle part) tombe à plat.
En rejetant à chaque fois tout élan dramatique, romantique et comique, le film, qui pourtant bénéficie de beaux talents (de la musique de Gabriel Yared au scénario de Santiago Ammigorena), paraît indécis de bout en bout, d’une transe maîtrisée à un final confus. « - Qu’est-ce que t’as de beaux yeux » dit une femme à Bernal. Et son pote de répondre « Si tu voyais son cœur. Mais il le donne pas son cœur. » Cette réplique en début de film résume tout. On peut trouver une image belle mais le film ne montre jamais sa beauté intérieure, refusant même de s’ouvrir généreusement au spectateur.
Au point de sombrer parfois dans le grotesque, ce genre de film monstrueux où l’on ne sait plus si nous devons rire quand la situation semble si noire. En voulant arpenter une voie formelle singulière, illustrer l’aliénation avec l’enfermement dans un lieu miteux, suivre un homme à la fois ange et exterminateur, Joan Chemla s’égare dans son dédale sans retrouver la sortie.
La fin énigmatique et suffocante n’aide pas à adhérer à ce délire vaporeux.
vincy
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