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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Get Out
USA / 2017
03.05.2017
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BLACK MINDS MATTER
"Ne gâchons pas la matière grise."
Enorme succès commercial aux Etats-Unis, le premier film de l'humoriste de Jordan Peele est sans aucun doute le meilleur thriller de l'année. Pas étonnant dès lors qu'il soit nommé 4 fois aux prochains Oscars !
Méfiez-vous de votre belle-famille
Chris est noir, Rose est blanche. Ils sont ensemble depuis plusieurs mois et filent le parfait amour. Voilà pourquoi Chris accepte de rencontrer les parents de Rose, Missy et Dean. Mais très vite, il se rend compte que sa couleur de peau n'est pas le seul problème : d'étranges choses se produisent dans cette campagne éloignée de tout…
Thriller pur et dur, Get Out traite avec brio le racisme ordinaire ainsi que la couleur de peau de son personnage principal, Chris, jeune photographe noir bien dans ses baskets, et "woke". Au moment de préparer ses affaires pour le week-end à la campagne qui scellera sa relation avec Rose, il demande explicitement à celle-ci : "Ils savent que je suis black ?" Sans jamais en faire des tonnes, Jordan Peele crée une atmosphère anxiogène dans laquelle Chris se sent épié (un gendre noir dans une famille blanche ça dénote depuis Devine qui vient dîner ce soir), où le spectateur reste stupéfait.
Le scénario pose très vite les bases d'une confrontation sociale (et raciale). Il y a d'un côté un jeune homme noir qui tente de s'intégrer et de l'autre une famille blanche plus qu'étrange, toujours prompte à faire des remarques douteuses. Le père de Rose précise "J'ai voté Obama" quand son fils suppose "Tu dois aimer le basket ?" Mis bout à bout, les remarques et les comportements douteux mettent Chris et le spectateur mal à l'aise. Car dans Get Out, la couleur de peau n'est pas anodine.
Très vite, nous comprenons que les rares habitants noirs de la bourgade des parents de Rose sont loin d'être normaux. Le jardinier est flippant, la servante semble avoir un dédoublement de personnalité tandis que l'un des voisins désormais maqué à une femme d'âge mûr n'est plus lui-même.
Un premier film extraordinaire
Avec sa réalisation parfaite et son esthétique qui proche de celle d'Under the Skin, Jordan Peele signe un film engagé qui ravit toute la communauté noire américaine, confrontée à ses (ces) peurs. Avec beaucoup d'ironie, Get Out fait mal à l'Amérique blanche qui "objectifie" encore trop souvent les hommes noirs. Abattus en raison de leur prédisposition supposée à la violence, ils sont ici le vecteur des fantasmes sexuels de WASP dérangés.
Très politisé, Jordan Peele est principalement connu pour ses sketches Key & Peele, diffusés sur Comedy Central. Particulièrement inspiré, il met ici en scène les pires cauchemars de toute une génération consciente que les mentalités changent mais que les clichés ont la vie dure. De son flic blanc à cran dès qu'il voit un noir au volant d'une voiture à cette belle-famille composée de psychopathes en passant par cette voisine plus intéressée par la taille du sexe de Chris que par ses hôtes, Jordan Peele dévoile une galerie de personnages plus réalistes qu'on ne le souhaiterait.
Drôle et dérangeant à la fois, Get Out est de ces films que l'on oublie pas tant il laisse songeur et nous hante. Crue et violente, la première réalisation de Jordan Peele mérite tous les honneurs - en particulier pour son acteur principal, la révélation qu'est Daniel Kaluuya. Déjà vu dans Sicario, Skins, Black Mirror et bientôt à l'affiche de Black Panther, il mériterait d'être le premier noir non américain à être sacré meilleur acteur aux Oscars.
wyzman
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